Essais sur la Guîtâ

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Essays on the philosophy and method of self-discipline presented in the Bhagavad Gita. These essays were first published in the monthly review Arya between 1916 and 1920 and revised in the 1920s by Sri Aurobindo for publication as a book.

Sri Aurobindo Birth Centenary Library (SABCL) Essays On The Gita Vol. 13 576 pages 1970 Edition
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Essays on the philosophy and method of self-discipline presented in the Bhagavad Gita. These essays were first published in the monthly review Arya between 1916 and 1920 and revised in the 1920s by Sri Aurobindo for publication as a book. A translation, by Pavitra, of the first seven chapters appeared in 1947. The present edition includes this translation and that, carried out by Archaka, of the forty-one other chapters.

French Translations of books by Sri Aurobindo Essais sur la Guîtâ 675 pages 2008 Edition
French Translation
Translators:
  Archaka
  Pavitra
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XVII

 

LA NAISSANCE DIVINE ET LES ŒUVRES DIVINES

 

Le travail pour lequel descend l'Avatâr a, comme sa naissance, une double signification et une double forme. Il a un aspect extérieur où la force divine agit sur le monde extérieur afin d'y maintenir et remodeler la loi divine par laquelle l'humanité, en son effort vers Dieu, est préservée d'un décisif retour en arrière et au contraire portée en avant de façon décisive malgré la loi d'action et de réaction, le rythme de progression et de régression selon quoi se meut la Nature. Il a un aspect intérieur où la force divine de la conscience tournée vers Dieu agit sur l'âme de l'individu et l'âme de la race, de façon qu'elles puissent recevoir de nouvelles formes de révélation du Divin en l'homme et être soutenues, renouvelées et enrichies en leur pouvoir de déploiement ascendant. L'Avatâr ne descend pas simplement pour une grande action extérieure, comme le sens pragmatique dans l'humanité est trop souvent tenté de le croire. L'action et l'événement n'ont pas de valeur en soi, ils ne prennent leur valeur que dans la force qu'ils représentent et l'idée qu'ils symbolisent, et que la force est là pour servir.

La crise où apparaît l'Avatâr, bien qu'elle ne semble être à l'œil extérieur qu'une crise d'événements et de grands changements matériels, est toujours à sa base et en sa signification réelle une crise dans la conscience de l'humanité au moment où celle-ci doit subir une modification majeure et effectuer un nouveau développement. Pour cette action, pour ce changement, une force divine est nécessaire; mais la force varie toujours en fonction du pouvoir de conscience qu'elle incarne; d'où la nécessité d'une conscience divine se manifestant dans le mental et l'âme de l'humanité. En fait, là où le changement est surtout intellectuel et pratique, l'intervention de l'Avatâr n'est pas nécessaire; il y a un grand haussement de la conscience, une grande manifestation de pouvoir en quoi les hommes sont pour

 

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un temps soulevés au-dessus de leur moi normal, et les crêtes de cette houle de conscience et de pouvoir se trouvent en certains individus exceptionnels vibhoûtis dont l'action, qui guide l'action générale, suffit au changement prévu. La Réforme en Europe et la Révolution française furent des crises de ce genre; non pas de grands événements spirituels, mais des changements intellectuels et pratiques, l'un sur le plan des idées, des formes et des motifs religieux, l'autre sur celui des idées, des formes et des motifs sociaux et politiques, et la modification de la conscience générale qui en résulta fut une modification mentale et dynamique, et non pas spirituelle. Mais lorsque la crise contient une graine ou une intention spirituelles, alors une manifestation complète ou partielle de la conscience de Dieu dans un mental humain et une âme humaine vient la lancer ou la guider. Et cela, c'est l'Avatâr.

L'action extérieure de l'Avatâr est décrite dans la Guîtâ comme la restauration du Dharma; lorsque, d'âge en âge, le Dharma pâlit, languit, perd de sa vigueur et que, puissant et oppressif, s'élève son contraire, alors l'Avatâr vient le réinsttuer; et comme alors les choses en tant qu'idées sont toujours représentées par des choses en tant qu'action et par des êtres humains qui obéissent à la poussée de celles-ci, sa mission, en ses termes les plus humains et les plus extérieurs, est de soulager ceux qui recherchent le Dharma et qu'oppresse le règne de la ténèbre qui ne veut pas du progrès, et de détruire ceux qui font le mal et cherchent à maintenir le déni du Dharma. Mais on peut facilement donner au langage utilisé une pauvre et insuffisante nuance qui ôterait au fait de l'Avatâr toute sa profondeur spirituelle. Dharma est un mot qui a une signification éthique et pratique, naturelle et philosophique, religieuse et spirituelle, et on peut l'employer dans n'importe lequel de ces sens à l'exclusion des autres, dans un sens purement éthique, purement philosophique, ou purement religieux. Sur le plan éthique, Dharma veut dire la loi de rectitude, la loi morale de conduite ou, dans un sens encore plus extérieur et pratique, la justice sociale et politique, voire simplement l'observance de la loi sociale. Si le mot est employé dans ce sens, il nous faudra

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comprendre que, lorsque prévalent l'improbité, l'injustice et l'oppression, l'Avatâr descend délivrer les bons et détruire les méchants, renverser l'injustice et l'oppression et restaurer l'équilibre éthique de l'humanité.

C'est ainsi que, selon la représentation populaire et mythique de Krishna l'Avatâr, l'injustice des Kourous, telle que la personnifiaient Douryôdhana et ses frères, devint un tel fardeau pour la terre que celle-ci dut invoquer Dieu afin qu'il descendît et lui allégeât sa charge; en conséquence, Vishnou, incarné en Krishna, délivra les Pândavas opprimés et détruisit les injustes Kaouravas. Semblable relation est donnée de la descente des précédents Avatârs de Vishnou : de Rama détruisant l'injuste oppression de Râvana, de Parashourâma détruisant l'injuste licence de la caste militaire et princière, les kshatriyas, du nain Vâmana détruisant le gouvernement du titan Bali. Mais il est évident que la mission purement pratique, éthique ou sociale et politique de l'Avatâr à laquelle est ainsi donnée une forme populaire et mythique ne rend pas un compte exact du phénomène qu'est l'existence de l'Avatâr. Elle n'en couvre pas le sens spirituel et, si son utilité extérieure était tout, il nous faudrait exclure le Bouddha et le Christ dont la mission n'était aucunement de détruire les méchants et de délivrer les bons, mais d'apporter à tous les hommes un nouveau message spirituel et une nouvelle loi de croissance divine et de réalisation spirituelle. En revanche, si nous donnons au mot Dharma son seul sens religieux, suivant lequel il désigne une loi de vie religieuse et spirituelle, nous parviendrons bien au cœur du problème, mais risquerons d'éliminer une part fort importante de l'œuvre accomplie par l'Avatâr. Dans l'histoire des incarnations divines, nous voyons toujours le double aspect de l'oeuvre et inévitablement parce que l'Avatâr se charge des opérations de Dieu dans la vie humaine le chemin suivi par la Volonté et la Sagesse divines dans le monde; et cette œuvre s'accomplit extérieurement aussi bien qu'intérieurement, par un progrès intérieur dans l'âme et par un changement extérieur dans la vie.

L'Avatâr peut descendre en tant que grand instructeur spirituel et sauveur, tels le Christ, le Bouddha; une fois terminée sa

 

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manifestation terrestre, son œuvre, cependant, conduit toujours à un profond et puissant changement non seulement dans la vie éthique, mais dans la vie sociale et extérieure et dans les idéaux de la race. Il peut, d'autre part, descendre en tant qu'incarnation de la vie divine, de la personnalité et du pouvoir divins en leur action caractéristique pour une mission ostensiblement sociale, éthique et politique, comme le montre l'histoire de Rama ou de Krishna; mais toujours cette descente devient alors dans l'âme de la race un pouvoir permanent pour la vie intérieure et la renaissance spirituelle. A vrai dire, il est curieux de noter que l'effet permanent, vital, universel du bouddhisme et du christianisme a été la force de leurs idéaux éthiques, sociaux et pratiques et leur influence même sur les hommes et les époques qui rejetèrent leurs croyances, leurs formes et leurs disciplines spirituelles et religieuses; l'hindouisme, qui rejeta le Bouddha, son sangha et son dharma, porte après coup l'ineffaçable empreinte de l'influence sociale et morale du bouddhisme  et de son action sur les idées et la vie de la race, tandis que dans  l'Europe moderne, qui n'est chrétienne que de nom, l'humanitarisme dans la sphère éthique et sociale et l'aspiration à la liberté, l'égalité, la fraternité dans la sphère sociale et politique — traduisent les vérités spirituelles du christianisme, la seconde étant surtout réalisée par les hommes qui rejetèrent  agressivement la religion chrétienne et la discipline spirituelle et par une époque qui, dans son effort intellectuel d'émancipation, essaya de se débarrasser de l'article de foi que représentait le christianisme. En revanche, la vie de Rama et celle de Krishna  appartiennent au passé préhistorique qui ne nous est parvenu que dans la poésie et la légende et que l'on peut même tenir pour mythique; mais que nous les regardions comme des mythes ou des faits historiques est sans grande importance, car leur vérité et leur valeur permanentes résident en leur persistance en tant que formes, présences, influences spirituelles dans la conscience intérieure de la race et dans la vie de l'âme humaine. L'existence de l'Avatâr est un fait de la vie et de la conscience divines, qui peut se réaliser dans une action extérieure mais doit, une fois cette action terminée et son travail accompli, se

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prolonger en une influence spirituelle; ou qui peut se réaliser dans une influence et un enseignement spirituels, mais qui, même quand la nouvelle religion ou la nouvelle discipline sont taries, doit avoir son effet permanent dans la pensée, le tempérament et la vie extérieure de l'humanité.

Afin de comprendre la description que nous donne la Guîtâ de l'oeuvre de l'Avatâr, il nous faut donc prendre l'idée de Dharma dans sa conception la plus riche, la plus profonde et la plus vaste, considérer le Dharma comme la loi intérieure et extérieure par laquelle la Volonté et la Sagesse divines élaborent l'évolution spirituelle de l'humanité, ainsi que ses circonstances et ses résultats dans la vie de la race. Dans la conception indienne, le Dharma n'est pas simplement le bien, le droit, la morale, la justice, l'éthique : c'est l'entier gouvernement de toutes les relations de l'homme avec les autres êtres, avec la Nature, avec Dieu, considéré du point de vue d'un principe divin qui s'élabore en des formes et des lois d'action, formes de la vie intérieure et extérieure, ordonnances concernant tous les genres de relations au monde. Le Dharma¹ est à la fois ce à quoi nous nous tenons et ce qui maintient la cohésion de nos activités intérieures et extérieures. Au sens premier, le mot désigne une loi fondamentale de notre nature qui conditionne secrètement toutes nos activités, et dans ce sens chaque être, chaque type, chaque espèce, chaque individu, chaque groupe a son dharma. En second lieu, il y a la nature divine qui doit se développer et se manifester en nous et, dans ce sens, le dharma est la loi des opérations intérieures par lesquelles cette nature grandit en notre être. Troisièmement, il y a la loi par laquelle nous gouvernons l'émission de notre pensée et de notre action ainsi que nos relations avec chacun afin d'aider le mieux possible et simultanément à notre propre croissance et à celle de la race humaine dans le sens de l'idéal divin.

On parle généralement du dharma comme de quelque chose d'éternel et d'inaltérable, et c'est ce qu'il est en son principe fondamental, dans l'idéal; toutefois, ses formes ne cessent de

 

¹Le mot désigne l'action de tenir, de la racine dhri, tenir.

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changer ni d'évoluer, parce que l'homme ne possède pas encore l'idéal ou n'y vit pas encore, mais y aspire plus ou moins parfaitement, grandit dans le sens de la connaissance et de la mise en pratique de cet idéal. Et au cours de cette croissance, le dharma est tout ce qui nous aide à grandir en pureté, ampleur, lumière, liberté, puissance, force, joie, unité, beauté, amour, bien divins. S'y opposent son ombre et sa négation, tout ce qui résiste à sa croissance et n'a pas subi sa loi, tout ce qui n'a pas livré ni ne désire livrer le secret de ses valeurs divines, mais présente un visage de perversion et de contradiction, d'impureté, d'étroitesse, de servitude, d'obscurité, de faiblesse, de vilenie, de discorde et de souffrance et de division; s'y opposent le hideux et le fruste, tout ce que l'homme en son progrès doit laisser derrière lui. Tel est l'adharma, le non-dharma qui lutte contre le dharma et cherche à le vaincre, à tirer les choses en arrière et vers le bas, la force de réaction qui travaille pour le mal, l'ignorance et l'obscurité. Entre les deux, c'est une bataille, un combat perpétuels, une alternance de victoire et de défaite où l'emportent tour à tour les forces dirigées vers le haut et les forces dirigées vers le bas. C'est ce qu'ont illustré l'image védique de la lutte des pouvoirs divins et des puissances titanesques, des fils de la Lumière et de l'Infinité indivise et des enfants de la Ténèbre et de la Division, dans le zoroastrisme Ahouramazda et Ahriman, et dans les religions ultérieures le conflit entre Dieu et ses anges d'une pan et Satan ou Iblis et ses démons de l'autre pour la possession de la vie humaine et de l'âme humaine.

Ce sont ces choses qui conditionnent et déterminent le travail de l'Avatâr. Dans la formule bouddhique, le disciple, contre tout ce qui s'oppose à sa libération, prend refuge en trois pouvoirs, le dharma, le sangha, le Bouddha. De même, dans le christianisme, avons-nous la règle de vie chrétienne, l'Eglise et le Christ. Toujours, ces trois choses sont les éléments nécessaires de l'oeuvre de l'Avatâr. Il donne un dharma, une loi de discipline de soi par laquelle dépasser la vie inférieure et entrer dans la vie supérieure, qui inclut nécessairement une règle d'action et de relations avec nos semblables et les autres êtres,

 

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un effort sur l'octuple sentier, ou le commandement de la foi, de l'amour et de la pureté, ou toute autre révélation analogue de la nature du divin dans la vie. Puis, toute tendance en l'homme ayant son aspect collectif autant qu'individuel, ceux qui suivent une voie étant naturellement rassemblés en une communauté et une unité spirituelles, il établit le sangha, la communauté et l'union de ceux qu'unissent sa personnalité et son enseignement. La même triade existe dans le vaïshnavisme : bhâgavata, bhakta, bhagavân le bhâgavata, qui est la loi vaïshnava d'adoration et d'amour, le bhakta représentant la communauté de ceux en qui la loi est manifestée, le bhagavân, l'Amant et le Bien-Aimé divin en l'être et la nature de qui la divine loi d'amour se fonde et s'accomplit. L'Avatâr représente ce troisième élément de divine personnalité, de nature divine, d'être divin qui est l'âme du dharma et du sangha, les imprègne de lui-même, les conserve vivants et attire les hommes vers la félicité et la libération.

Dans l'enseignement de la Guîtâ, qui est plus universel et complexe que d'autres disciplines et enseignements spécialisés, ces choses prennent une plus vaste signification. Car l'unité est ici l'unité védântique qui embrasse tout et par laquelle l'âme voit tout en elle-même, se voit elle-même en tout et se fait une avec tous les êtres. Le dharma consiste dès lors à hisser toutes les relations humaines à une signification divine plus haute; il élève en l'imprégnant de la conscience brahmique la règle dont il part, la règle éthique, sociale et religieuse établie qui lie toute la communauté où vit celui qui cherche Dieu; la loi qu'il donne est la loi de l'unité, de l'égalité, de l'action libérée, sans désir, gouvernée par Dieu, de la connaissance de Dieu et de soi éclairant et attirant à elle toute la nature et toute l'action, les attirant vers l'être divin et la conscience divine, et la loi de l'amour de Dieu en tant que suprême pouvoir et couronnement de la connaissance et de l'action. L'idée de communauté et d'entraide dans l'amour de Dieu et la recherche de Dieu, qui est à la base de l'idée du sangha ou collectivité divine, est introduite lorsque la Guîtâ parle de la recherche de Dieu par l'amour et l'adoration, mais le sangha véritable de cet enseignement est

 

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toute l'humanité. Le monde entier va dans le sens de ce dharma, chacun selon sa capacité "C'est Mon chemin que, de toute façon, suivent les hommes" -, et celui qui cherche Dieu, devenant un avec tous, faisant siens leur joie et leur chagrin et toute leur vie, l'homme libéré déjà devenu un seul être avec tous les êtres, vit dans la vie de l'humanité, vit pour le Moi unique en l'humanité, pour Dieu en tous les êtres, agit pour le lôka-sangraha, pour le maintien de tous en leur dharma et en le Dharma, pour le maintien de leur croissance à tous ses stades et. en tous ses chemins vers le Divin. Car ici, l'Avatâr, bien que manifesté sous le nom et la forme de Krishna, ne souligne point de façon exclusive cette forme unique de sa naissance humaine; il souligne ce qu'elle représente, le Divin, le Pouroushôttama, dont tous les Avatârs sont les naissances humaines, dont toutes les formes et tous les noms de la Divinité qu'adorent les hommes sont les représentations. La voie que Krishna fait connaître ici est en fait présentée comme la voie par laquelle l'homme peut atteindre la vraie connaissance et la vraie libération, mais c'est une voie qui comprend tous les chemins au lieu de les exclure. Car le Divin reprend en son universalité tous les Avatârs et tous les enseignements et tous les dharmas.

La Guîtâ met l'accent sur le combat dont le monde est le théâtre et qui a deux aspects, la lutte intérieure et la bataille extérieure. Dans la lutte intérieure, les ennemis sont au-dedans, dans l'individu; et la mise à mort du désir, de l'ignorance, de l'égoïsme figure la victoire. Mais il y a également un combat extérieur entre les puissances du Dharma et celles de l'Adharma dans la collectivité humaine. Les premières sont soutenues par la nature divine, la nature à l'image de Dieu, et par ceux qui la représentent ou qui s'efforcent de la réaliser dans la vie humaine; les secondes par la nature titanesque ou démoniaque,  la nature asourique et râkshasique dont le trait principal est l'égoïsme, et par ceux qui la représentent et s'efforcent de la satisfaire. C'est la guerre des dieux et des titans, dont le symbole emplit l'ancienne littérature indienne; la lutte du Mahâbhârata, dont Krishna est le personnage central, est souvent représentée dans ce sens : les Pândavas, qui combattent pour établir le

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royaume du Dharma, y sont les fils des dieux, leurs pouvoirs sous des formes humaines; leurs adversaires sont des incarnations des pouvoirs titanesques, ce sont des asouras. L'Avatâr vient aussi aider à ce combat extérieur, directement ou indirectement, il vient détruire le règne des asouras, de ceux qui font le mal, ravaler en eux le pouvoir qu'ils représentent et restaurer les idéaux opprimés du Dharma. Il vient rapprocher dans la collectivité le royaume des cieux sur la terre, ainsi qu'édifier le royaume des cieux intérieurs dans l'âme humaine individuelle.

Remportent le fruit intérieur de la venue de l'Avatâr ceux à qui cette venue enseigne la vraie nature de la naissance divine et des œuvres divines et qui leur conscience s'emplissant de lui, tandis que, de tout leur être, ils prennent refuge en lui, manmayâ mâm oupâshritâh, purifiés par la force réalisatrice de leur connaissance et délivrés de la nature inférieure accèdent à l'être divin et à la divine nature, madbhâvam. L'Avatâr vient révéler la divine nature en l'homme au-dessus de cette nature inférieure, et montrer ce que sont les œuvres divines, libres, sans égoïsme, désintéressées, impersonnelles, universelles, pleines de la lumière divine, du pouvoir divin et de l'amour divin. Il vient en tant que personnalité divine qui doit emplir la conscience de l'être humain et remplacer l'égoïste personnalité limitée de façon que, libérée de l'ego, celle-ci entre dans l'infinité et l'universalité, que, libérée de la naissance, elle entre dans l'immortalité. Il vient en tant que pouvoir divin, qu'amour divin qui appelle à lui les hommes de façon que ceux-ci puissent y prendre refuge, au lieu de se réfugier en l'insuffisance de leurs volontés humaines et en la lutte de leur crainte, de leur colère, de leurs passions humaines, et que, libérés de toute cette inquiétude et de toute cette souffrance, ils puissent vivre en le calme et la béatitude du Divin¹. Ni la forme et le nom sous lesquels il vient ni l'aspect du Divin qu'il met en avant n'ont une

 

¹djanma karma tcha me divyam évam yo vetti tattwatah

tyaktwâ déham pounar-djanma naïti mâm éti sô'rdjouna.

vita-râga-bhaya-krôdhâ manmayâ mâm oupâshritâh

bahavo djñana-tapasâ poûtâ madbhâvam âgatâh.

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importance essentielle; car de toute façon, avec les variations de leur nature, les hommes suivent la voie tracée pour eux par le Divin à qui elle les mène pour finir; et l'aspect du Divin qui convient à leur nature est celui-là qu'ils peuvent suivre le mieux lorsqu'il vient les guider; de quelque façon que les hommes acceptent Dieu et l'aiment et se réjouissent en lui, c'est de cette façon-là que Dieu accepte et aime l'homme et se réjouit en lui. Yé yathâ mâm prapadyanté tânstathaïva bhadjâmyaham.

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