CWM (Fre) Set of 18 volumes
Notes sur le Chemin Vol. 11 of CWM (Fre) 422 pages 2009 Edition
French

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Dans ces conversations, la Mère confie à un disciple ses expériences sur le chemin du « yoga du corps », au cours des années 1961-1973.

Notes sur le Chemin

The Mother symbol
The Mother

Dans ces conversations, la Mère confie à un disciple ses expériences sur le chemin du « yoga du corps », au cours des années 1961-1973.

Collection des œuvres de La Mère Notes sur le Chemin Vol. 11 422 pages 2009 Edition
French
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1969




Le 13 décembre 1969

Je continue à recevoir presque quotidiennement les Aphorismes de Sri Aurobindo, que j’avais totalement oubliés. Il y avait des choses bien intéressantes... Il y en a qui me donnent tout à fait l’impression d’un revêtement (on pourrait dire intellectuel mais ce n’est pas cela, c’est d’un mental supérieur mais mentalisé, c’est-à-dire que c’est accessible à la pensée), de l’expérience que j’ai eue, de la conscience supramentale, où cette différence du mal et du bien et tout cela, paraissait un enfantillage, et Sri Aurobindo l’exprime d’une façon accessible à l’intelligence dans ces Aphorismes. Seulement... ceux qui comprennent, ne comprennent pas bien! Parce qu’ils comprennent en dessous.

Tu te souviens de ces Aphorismes?... Il y en a un où il dit : « Si je ne peux pas être Râma, alors je veux être Râvana », et il explique pourquoi. C’est dans cette série-là42.

(silence)

Il y a un problème pratique, là : on voit bien, il y a certains mouvements que l’on voudrait supprimer parce que l’on se rend compte que c’est une faille, mais on ne sait pas comment faire. Est-ce que c’est d’au-dessus? On met la lumière dessus chaque fois que tel mouvement vient, et puis...

Cela dépend du genre de mouvement, mon petit, dans quelle partie de l’être et quel est le genre de mouvement.

Je suis convaincue que chaque difficulté est un problème spécial. On ne peut pas faire une règle générale.

Par exemple, l’autre jour tu disais que la naissance était une « purge »...

(Mère rit)

Tu te souviens : que les gens qui avaient tout refoulé, cela ressortait dans les enfants43 .

Oui, oui!

Et tu disais que ça donnait la clef de ce qu’il ne fallait pas faire.

Oui.

Alors je voudrais savoir quelle est la clef de la guérison sans refoulement. Parce que justement, d’habitude, on met la Lumière, et puis le faux mouvement s’enfonce en dessous.

Ah! ça, oui, c’est une règle générale. C’est le contraire qu’il faut : au lieu de repousser, c’est de l’offrir. C’est de mettre la chose, le mouvement lui-même, de le projeter dans la Lumière... Généralement, il se tortille et il refuse! Mais (riant) c’est la seule façon. C’est pour cela que c’est si précieux, cette Conscience... N’est-ce pas, ce qui produit le refoulement, c’est l’idée du bien et du mal, une espèce de mépris, de honte de ce qui est considéré comme mal, et alors on fait comme cela (geste de repousser), on ne veut pas le voir, on ne veut pas le laisser être. Il faut... La première chose — la première chose à réaliser, c’est que c’est l’infirmité de notre conscience qui fait cette division, et qu’il y a une Conscience (maintenant j’en suis sûre), il y a une Conscience où ça n’existe pas, où ce que nous appelons « mal » est aussi nécessaire que ce que nous appelons « bien », et que si nous pouvons projeter notre sensation — ou notre activité ou notre perception —, la projeter dans cette Lumière-là, c’est ça qui guérit44 . Au lieu de refouler ou de rejeter comme une chose que l’on veut détruire (ça ne peut pas se détruire!), il faut le projeter dans la Lumière. Ça, j’ai eu plusieurs jours d’une expérience très intéressante à cause de cela, justement au lieu de vouloir rejeter loin de soi certaines choses (que l’on n’admet pas, qui produisent un déséquilibre dans l’être), au lieu de cela, de les accepter, de les prendre comme une partie de soi-même et... (Mère ouvre les mains) de les offrir. Elles ne veulent pas être offertes, mais il y a un moyen de les obliger. Un moyen de les obliger : la résistance est diminuée d’autant que nous pouvons diminuer en nous le sens de désapprobation. Si nous pouvons remplacer ce sens de désapprobation par une compréhension supérieure, alors on arrive. C’est beaucoup plus facile.

Je crois que c’est cela. Tous, tous les mouvements qui tirent vers le bas, il faut les mettre en contact avec la compréhension supérieure.

Seulement, c’est évidemment au-delà du mental. Parce que, je disais tout à l’heure que ces Aphorismes de Sri Aurobindo étaient des expressions compréhensibles pour l’intellect, mais ça diminue tout de même; ça diminue, ce n’est plus cet éblouissement de la compréhension sans mots — c’est là, c’est là que les choses peuvent être arrangées.

Et même quand on se les explique à soi-même, ça diminue. Il ne faut rien dire. C’est comme si (riant) on mettait une couche de peinture qui déforme.

Mère prend soudain un bloc-note près d’elle et
écrit la réponse à une lettre qu’elle avait lue au
début de l’entrevue.

C’est venu comme cela. C’est comme cela que ça se produit : tout d’un coup, brrf! et puis ça reste, ça ne veut plus s’en aller jusqu’à ce que j’écrive. C’est amusant.

C’est amusant parce que ça ne correspond pas (je ne peux même pas dire à ce que je pense parce que, à dire vrai, je ne pense plus) à mon expérience, mais à ce dont l’autre a besoin. La réponse est dictée pour l’autre. Les mots, les expressions, la tournure de phrase, la présentation, diffèrent tout à fait suivant les gens à qui c’est écrit. Et cette conscience-là (celle de Mère) qui est là (geste au-dessus), n’y est pour rien du tout. Elle reçoit. Elle reçoit, et alors ça descend et puis ça fait comme cela (geste de martèlement) jusqu’à ce que j’écrive! Ça ne veut pas s’en aller avant que ce soit écrit. C’est très amusant... Comme cela, on peut faire beaucoup de travail sans fatigue! (Mère rit)

J’aimerais bien en prendre de la graine!

Tiens! (Mère donne ses mains en riant)

Parce que, même dans un silence mental... je suis toujours habitué à écrire dans le silence mental, mais malgré tout, dans ce silence, je me méfie que ce ne soient pas de vieilles formations ou réactions qui viennent s’exprimer dans le silence.

Ah! oui.

J’ai peur de cela.

Oui, de vieilles choses qui remontent.

Mais tu ne sens pas que ça vient d’en haut?

Je sens que la Force est là et que ça descend.

Oui, et alors?

Eh bien, oui, mais après, quand j’ai écrit certaines choses, je me dis...

Ah! ça arrive très souvent.

Je me dis : peut-être n’aurais-je pas dû dire ça ?

Mais alors c’est le mental qui intervient.

Je ne sais pas.

Cela m’arrive aussi. Parfois, j’écris et puis j’envoie, et après je me souviens de ce que j’ai écrit, je me dis : diable! je n’aurais pas dû dire cela !... Et je m’aperçois après que c’est très bien — que c’est la réaction qui est une réaction mentale.

Cela m’est arrivé plusieurs fois. Par exemple l’autre jour, j’ai dû écrire à Z. Très souvent, il écrit des choses inadmissibles, mais je ne dis rien; et l’autre jour, j’ai écrit une lettre assez forte pour lui dire : qu’est-ce que ça signifie? Et après, je me suis dit non, il ne faut pas bouger, et je n’ai pas envoyé ma lettre... Qu’est-ce qu’il faut faire, je ne sais pas...

Ça, mon petit...

(silence)

C’est difficile.

Oui... Mais quand tu te tournes vers le haut, ou que tu aspires ou que tu es comme cela, ouvert à la Conscience suprême, c’est concret?

Ah ! oui, c’est solide.

C’est concret? Il faudrait que... Tu comprends, il n’y a qu’un moyen, c’est que l’ego s’en aille, voilà. C’est cela. C’est quand, là, au lieu de « je », il n’y a plus rien : tu sais, c’est tout à fait plan comme cela (geste immense, uni, sans une ride), avec une espèce de... pas même exprimé par des mots, mais une sensation très stable de : « Ce que Tu voudras, comme Tu voudras » (les mots deviennent tout petits). Vraiment avoir une sensation concrète que ça (le corps), ça n’existe pas, c’est seulement comme utilisé — qu’il n’y a que Ça. Ça qui fait comme cela (geste de pression). Cette impression de Ça, cette immensité consciente qui (Mère étend ses bras)... On finit par le voir, n’est-ce pas (le « voir », ce n’est pas une vision avec des images mais c’est une vision... je ne sais pas avec quoi ! mais c’est très concret, c’est beaucoup plus concret que les images), vision de cette Force immense, cette Vibration immense, qui presse, presse, presse, presse... et puis alors, le monde qui gigote dessous (!) et la chose qui s’ouvre, et quand ça s’ouvre, ça entre et ça se répand.

C’est vraiment intéressant.

C’est la seule solution, il n’y en a pas d’autres. Tout le reste, c’est... des aspirations, des conceptions, des espoirs, des... c’est encore du super-homme mais ce n’est pas du supramental. C’est d’une humanité supérieure qui essaye de tirer toute son humanité vers le haut, mais ça... ça ne sert à rien. Ça ne sert à rien.

L’image est très claire, de toute cette humanité qui s’accroche pour grimper, qui essaye d’attraper comme cela, mais qui, elle, ne se donne pas — elle veut prendre! Et ça, ça ne va pas. Il faut qu’elle s’annule. Alors la Chose peut venir, peut prendre sa place.

Tout le secret est là.

Par exemple, tout ce côté de l’humanité qui veut prendre par force les choses et qui les tire là (geste à hauteur du front)... C’est intéressant; on ne peut pas dire, c’est intéressant, mais c’est pas ça ! C’est pas ça, il faut que toutes ces possibilités soient épuisées pour que quelque chose dans l’humanité comprenne... qu’il n’y a que Ça (Mère ouvre les mains dans un geste d’abandon), voilà, et puis se laisser aplatir jusqu’à disparition.

Au fond, c’est cela le plus difficile : apprendre à disparaître.

(silence)

Bien, mon petit (riant), on y arrivera !









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