Dans ces conversations, la Mère confie à un disciple ses expériences sur le chemin du « yoga du corps », au cours des années 1961-1973.
Mère commence par commenter son message distribué pour le Darshan du 21 février :
« Ce n’est que la paix immuable qui peut donner l’éternité d’existence. »
Je me souviens que j’ai écrit cela après avoir eu l’expérience que l’immobilité de l’Inconscient, le début de la création, c’est (on ne peut pas dire une « projection »), c’est une sorte de symbole inanimé, ou inconscient, de l’Éternité, de l’Immobilité — ce n’est pas « immobilité », les mots ne valent rien, c’est entre immobilité et stabilité. Là, j’ai écrit « paix », mais « paix » est un pauvre mot, ce n’est pas cela, c’est infiniment plus que la paix, mais c’est le « quelque chose » (même le mot « éternel » donne un sens limité, tous les mots sont impossibles), le quelque chose qui est l’Origine de tout, et le commencement de l’évolution de la manifestation pour rejoindre l’Origine (Mère dessine une courbe qui joint l’un et l’autre).
J’ai l’impression que c’était au Playground32 , et c’était comme si l’immobilité inconsciente — l’immobilité de l’Inconscient, l’immobilité inerte de l’Inconscient — était le point de départ de l’évolution, et c’était comme la traduction de cette... comment dire... c’est aussi un autre genre d’immobilité!... mais une Immobilité qui contient tous les mouvements de cette immobilité de l’Origine, cette stabilité, et que toute l’évolution est pour que ça retrouve Ça, avec tout le passage (même geste comme une grande courbe). C’était une vision très claire, je me souviens d’avoir écrit cela. Et quand j’ai lu cela, l’expérience est revenue. N’est-ce pas, on parle toujours de « chute » — ce n’est pas cela ! ce n’est pas du tout cela. S’il y a une chute, c’est au moment où le vital est devenu une volonté d’indépendance : ce n’est pas au début, c’est tout à fait en cours de route... Dans l’ancienne tradition, ils disent que c’est le Conscient qui est devenu l’Inconscient parce qu’il s’est « coupé de l’Origine » — cela me fait l’effet d’histoires racontées pour les enfants.
C’est curieux, dans le silence et la vision, c’est très clair et très lumineux, compréhensible; dès qu’on veut le dire, ça devient idiot.
Mais alors, dans la création même telle qu’elle est maintenant, c’est vrai, c’est peut-être le mot « paix » qui est le plus proche — quoique ce ne soit pas cela, il est tout petit et tout restreint, ce n’est pas cela. Dès que quelque chose se dérange ou va mal, c’est ça (cette « paix ») qui vient comme le remède, dedans.
(silence)
Oh ! les mots ne valent rien, je ne sais pas comment faire, je ne sais pas si c’est parce que je n’en ai pas assez, ou bien que vraiment... Toute expression mentale semble artificielle. Cela donne l’impression d’une pellicule sans vie. C’est curieux. Et tout le langage appartient à ce domaine-là. Cette expérience, quand je veux la dire... Avec certaines gens, j’entre très, très bien, très facilement en relation, dans le silence, et je leur dis infiniment plus de choses que je ne pourrais en dire avec des mots; c’est plus souple, plus exact, plus profond... Tiens! la parole, les phrases, les choses écrites, me font l’effet de l’image à deux dimensions, l’image ordinaire; et cela, ce contact-là que j’ai d’une façon avec les gens dès que je ne parle pas, cela ajoute la profondeur, et quelque chose de plus vrai ; ce n’est pas, c’est loin d’être tout à fait vrai, mais c’est plus vrai, et il y a une profondeur.
C’est pour cela que les expériences sont difficiles à dire. Ce ne sont plus des expériences séparées qui viennent l’une après l’autre, c’est comme un mouvement unique et global (geste rond) de transformation, et c’est d’une grande intensité.
Dans le fonctionnement ordinaire de la vie, il y a ce sentiment que « ça va », qui se traduit dans les gens par la sensation de bonne santé, et puis il y a un déséquilibre, une désorganisation ; et cette opposition, maintenant, paraît tout à fait artificielle : c’est seulement un mouvement continu, avec des passages d’un genre de vibration à un autre genre de vibration dont l’origine est beaucoup plus... comment dire... ce n’est pas « profond », ce n’est pas « plus haut », et « plus vrai » donne seulement un côté, ce n’est pas cela... enfin « supérieur » d’une façon quelconque — les mots sont idiots, tout à fait idiots. C’est comme cela, et c’est tout le temps comme cela (ce mouvement continu). Et alors, on est attiré à un endroit ou à un autre; c’est simplement le jeu de notre conscience, mais pour la Conscience qui voit tout, c’est un mouvement continu et global vers... oui, c’est bien cela, c’est pour que cet inerte Inconscient devienne l’absolu Conscient... Je ne sais pas, j’ai une vague impression qu’on a découvert (alors ici, tout à fait par terre, sur la Terre), qu’on a découvert qu’une certaine intensité de mouvement (c’est-à-dire ce que nous appelons « rapidité ») se traduit par une impression d’immobilité. J’ai une vague impression que l’on m’a dit cela. Mais cela correspond à quelque chose. Ce que j’ai appelé « paix » dans le message, ce qui est senti comme paix, c’est un paroxysme de mouvement, mais général — harmonieux, général.
Dès qu’on parle, ça a l’air d’une caricature.
(long silence)
Je finirai par me taire!
J’espère que non!
(Mère rit) Mais c’est si pauvret, tout cela.
Plus tard, on parlera en couleur.
Ah! ce serait joli...
C’est au point que quand on me dit quelque chose, par exemple que l’on me répète ce que j’ai dit, je ne comprends plus!... J’essaye de mon mieux, mais il y a toute l’intensité de la Conscience qui veut s’exprimer, et alors, quand c’est répété, cette intensité n’est plus là et ça n’a plus de sens.
Rien que ce message, justement, quand on me l’a lu, l’expérience est revenue, par conséquent je sais comment c’était, et alors ce mot « paix » contenait tant de choses!... Maintenant, ce n’est plus là.
Qu’est-ce que j’ai mis comme mot?
Paix, oui.
Immuable?
Oui : « Ce n’est que la paix immuable... »
Oui, et alors l’expérience était que cette même paix immuable (qui n’est ni « paix » ni « immuable »! mais c’est « quelque chose »), cette même Chose-là était dans l’inertie inconsciente. Et c’était tellement concret!... Et toute la courbe de la création pour que ça et Ça soient apparemment un (mais c’est un — c’est un). On pourrait dire (mais cela devient des phrases, ce sont des phrases) : devenir conscient de son identité. Mais c’est une phrase.
L’expérience est si intensément concrète que, dès que je me mets à parler, ça descend. Là (geste en haut), la conscience est claire, et puis...
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