CWM (Fre) Set of 18 volumes
Notes sur le Chemin Vol. 11 of CWM (Fre) 422 pages 2009 Edition
French

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Dans ces conversations, la Mère confie à un disciple ses expériences sur le chemin du « yoga du corps », au cours des années 1961-1973.

Notes sur le Chemin

The Mother symbol
The Mother

Dans ces conversations, la Mère confie à un disciple ses expériences sur le chemin du « yoga du corps », au cours des années 1961-1973.

Collection des œuvres de La Mère Notes sur le Chemin Vol. 11 422 pages 2009 Edition
French
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1967




Le 24 juin 1967

Beaucoup de choses à dire, mais... Il vaut mieux arriver au bout. C’est une courbe. Il vaut mieux arriver au bout. Il est trop tôt pour parler.

(Après un silence) La presque totalité des mouvements du corps sont des mouvements d’habitudes. Il y a, derrière, la conscience du mental physique (ce que j’appelle le « mental cellulaire ») qui, lui, est constamment conscient de la Présence divine et anxieux de ne rien admettre que Ça ; alors il y a tout un travail qui se fait pour changer, déplacer l’origine des mouvements. Je veux dire qu’au lieu que ce soit justement, automatiquement, l’habitude, que ce soit automatiquement la Conscience et la Présence divines qui fassent mouvoir (Mère fait le geste de pousser la Conscience dans le corps).

Mais c’est très, très inexprimable, c’est-à-dire que dès que l’on essaye d’exprimer, cela se mentalise, ce n’est plus ça. C’est pour cela que c’est très difficile à exprimer, je ne peux pas en parler.

Mais il me semble que je t’avais dit, il n’y a pas longtemps, cette constatation de l’habitude et du goût du drame dans la conscience la plus matérielle. C’était le point de départ. Dès que c’est devenu conscient, cette habitude-là est devenue on peut dire étrangère, étrangère à la conscience véritable, et alors le transfert est en train de se faire.

C’est un travail très délicat et difficile.

N’est-ce pas, c’est lutter contre une habitude millénaire. C’est l’automatisme de la conscience matérielle qui est, oui, dramatique, presque catastrophique; quelquefois dramatique, et dramatique avec l’imagination d’une conclusion qui défait le drame. Mais tout cela, dès qu’on l’exprime, cela devient beaucoup trop concret. Il vaut mieux ne pas en parler.

Dès que c’est dit, cela devient artificiel.

Et c’est comme si, pour remplacer cette habitude, il y avait une espèce d’effort pour en créer une autre (!) qui n’est qu’une approximation. Est-ce que cet état de conscience, cette manière d’être, cette manière d’exister, de réagir, d’exprimer, est-elle, tend-elle vers la Manifestation divine? Est-elle en conformité avec la tendance vers la Manifestation divine?... Et la pensée est silencieuse, immobile, alors l’imagination ne fonctionne pas (tout cela volontairement), et le mouvement essaye d’être aussi sincère et aussi spontané que possible, sous l’influence de la Présence divine... Les mots déforment tout.

De temps en temps — de temps en temps, tout d’un coup : l’expérience concrète, comme dans un éclair; l’expérience de la Présence, de l’identification. Mais cela dure quelques secondes, et puis cela recommence, comme c’était.

Cela ne peut pas s’exprimer.

Puis Mère passe à la traduction de deux textes de Sri Aurobindo.

« Le grand secret de la sâdhanâ, c’est de savoir faire faire les choses par le Pouvoir qui est derrière ou au-dessus, au lieu de tout faire par l’effort du mental. »

C’est exactement cela.

« L’importance du corps est évidente; c’est parce qu’il a été doté d’un corps et d’un cerveau capables de recevoir et de servir une illumination mentale progressive, ou qu’il les a développés, que l’homme s’est élevé au-dessus de l’animal. De même, ce ne peut être qu’en développant un corps, ou du moins un fonctionnement de l’instrument physique capable de recevoir et de servir une illumination plus haute encore, qu’il s’élèvera au-dessus de lui-même pour atteindre à une humanité parfaitement divine, non seulement dans sa pensée et dans son être intérieur, mais dans la vie. Sinon, ou bien la promesse de la Vie se verra annulée, son sens anéanti, et l’être terrestre ne pourra réaliser Satchidânanda qu’en s’abolissant luimême, en se dépouillant du mental, de la vie et du corps pour retourner au pur Infini, ou bien l’homme n’est pas l’instrument divin; une limite est fixée au pouvoir consciemment progressif qui le distingue des autres existences terrestres, et de même qu’il les a détrônées, de même un autre être devra finalement le remplacer pour assumer son héritage. »

(Sri Aurobindo, La Vie Divine, 2008, p. 265-66.)

Je comprends! J’étais occupée de cela tout le temps.

(silence)

Mais la conclusion de Sri Aurobindo, c’est que ce n’est pas ça (le corps) qui peut changer : ce sera un nouvel être.

Non, il dit si il ne peut pas, ce sera un nouvel être.

Non, je ne veux pas dire là, dans ce texte; je veux dire dans les choses qu’il a écrites après.

?...

D’ailleurs c’est la même chose, parce que... Qu’un corps puisse changer?... Et encore, cela paraît très difficile. Ce n’est pas impossible. Ce n’est pas impossible, mais... c’est un si formidable labeur que la vie est trop courte; alors même là, il y a quelque chose à changer, n’est-ce pas, cette habitude d’usure est une chose terrible.

Oui, mais un « nouvel être », d’où est-ce qu’il viendrait? Il tombera du ciel !

Mais non, c’est justement cela ! Plus on regarde... Cela ne va pas venir comme cela (Mère rit), cela va venir évidemment d’une manière analogue à la manière dont l’homme est venu de l’animal. Mais les échelons entre l’animal et l’homme, ils nous manquent — on le pense, on l’imagine, on a retrouvé des choses, mais à vrai dire on n’y a pas assisté! on ne sait pas comment cela s’est passé. Mais cela ne fait rien... D’après certains, on peut consciemment commencer à faire la transformation intérieurement, en formant l’enfant. C’est possible, je ne dis pas non. C’est possible. Et alors, il faudra que celui-là encore en fasse un autre plus transformé, et ainsi de suite, plusieurs échelons comme cela, qui disparaîtront comme ont disparu les échelons entre le singe et l’homme?...

Eh bien, oui, c’est toute l’histoire du perfectionnement humain.

On peut appeler cela comme on veut, n’est-ce pas. Mais un être nouveau... Nous, nous concevons comme tu dis un être nouveau qui descend tout fait, tout fabriqué!... Ça, c’est du roman-feuilleton.

C’est bien ce que Sri Aurobindo dit aussi. Il faut le fabriquer.

Ce serait après deux ou trois — ou quatre ou dix ou vingt, je ne sais pas — êtres intermédiaires, que viendrait la nouvelle manière, la manière supramentale de créer... Mais est-ce qu’il sera nécessaire d’avoir des enfants? Est-ce que cela ne supprimera pas la nécessité des enfants pour remplacer ceux qui ne seront plus, puisqu’ils continueront à être indéfiniment? Ils se transformeront eux-mêmes assez pour s’adapter aux besoins nouveaux.

Tout cela est très concevable à longue échéance.

Oui, longue échéance.

Mais justement vous êtes là pour que ce soit à brève échéance!

Non, Sri Aurobindo n’a pas conçu cela à brève échéance.

Enfin pour que ce soit toi. À brève ou longue échéance, mais que ce soit toi qui le fasses, dans cette vie et dans ce corps.

Mais je vois...

Je suis en train d’essayer de le faire — pas par une volonté arbitraire, rien du tout, simplement il y a « quelque chose » ou quelqu’un, ou une Conscience, ou n’importe quoi (je ne veux pas en parler) qui se sert de ça (le corps de Mère) en essayant d’en faire quelque chose. C’est-à-dire qu’en même temps je fais et je suis témoin, et le « je », je ne sais pas où il est : il n’est pas làdedans, il n’est pas là-haut, il n’est pas... Je ne sais pas où il est, c’est pour la nécessité du langage. Il y a « quelque chose » qui fait et qui assiste en même temps à la chose, et en même temps qui est l’action qui le fait : les trois.

Parce que le corps lui-même, maintenant, vraiment il collabore autant qu’il peut — autant qu’il peut — avec une bonne volonté et un pouvoir d’endurance qui va croissant, et vraiment le retour sur soi est réduit au minimum (il y en a, c’est comme quelque chose qui de temps en temps effleure, mais même pour quelques secondes cela ne reste pas). Ça, le retour sur soi, c’est tout à fait l’atmosphère dégoûtante, répugnante et catastrophique. Et c’est comme cela, c’est senti comme cela. Et cela devient de plus en plus impossible, je le vois, c’est visible... Mais il y a encore tout le poids des millénaires de mauvaises habitudes, que l’on pourrait appeler pessimistes, c’est-àdire s’attendant à la déchéance, s’attendant à la catastrophe, s’attendant... enfin toutes ces choses, et c’est cela qui est le plus difficile, ouf! à purifier, clarifier, sortir de l’atmosphère. C’est tellement dedans que c’est tout à fait spontané. C’est cela qui est le grand, grand obstacle : cette espèce de sentiment de l’inévitable déchéance.

Naturellement au point de vue mental, c’est toute l’atmosphère terrestre qui est comme cela, mais dans le mental cela a très peu d’importance : un rayon de lumière et c’est balayé. Mais c’est là-dedans (Mère désigne le corps), c’est cette habitude — cette habitude catastrophique — qui est terrible, terrible à contredire. Et il est indispensable qu’elle disparaisse pour que l’autre puisse s’installer.

Alors c’est une lutte de chaque minute, chaque minute, tout le temps, tout le temps.

Et, n’est-ce pas, l’être n’est pas isolé, le corps n’est pas isolé, il est plus ou moins une multitude, avec des degrés de proximité; mais très proches, il y a tous ceux qui sont ici, et c’est le même problème — même problème. Parce que ce qui est acquis dans la conscience de cet être-là, n’est pas acquis du tout dans la conscience des autres. Alors cela augmente le travail.

Le problème de la contagion mentale, et même vitale, est pour ainsi dire résolu, mais le problème de la contagion matérielle reste encore là.

Et dans cette conscience matérielle, il y a ce mental matériel, qui a si merveilleusement répondu ici16 , mais il n’a pas encore le pouvoir de s’affirmer spontanément contre ce qui vient du dehors, cette contagion perpétuelle, constante, constante, de chaque minute.

(long silence)

Quand tout d’un coup le Contact est conscient et le sens de l’Identité vient, comme je dis pour quelques secondes, mais quand cela vient... c’est comme un hosanna de toutes les cellules, qui disent : « Oh! mais oui, c’est vrai! c’est donc vrai... »

Cela vient peut-être cent fois par jour, mais cela ne reste pas.









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