Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.
« Le mental est un mouvement ; mais il y a beaucoup de variétés de ce mouvement, beaucoup de couches qui se touchent et même s’interpénètrent. En même temps, le mouvement que nous appelons “mental”, s’infiltre en d’autres plans. [...] Certaines régions mentales se trouvent très au-dessus du monde vital et échappent à son influence; on n’y rencontre pas de forces et d’êtres hostiles. Mais il y en a d’autres, beaucoup d’autres, qui peuvent être touchées et pénétrées par les forces vitales. » (Entretien du 26 mai 1929)
« Le mental est un mouvement ; mais il y a beaucoup de variétés de ce mouvement, beaucoup de couches qui se touchent et même s’interpénètrent. En même temps, le mouvement que nous appelons “mental”, s’infiltre en d’autres plans. [...] Certaines régions mentales se trouvent très au-dessus du monde vital et échappent à son influence; on n’y rencontre pas de forces et d’êtres hostiles. Mais il y en a d’autres, beaucoup d’autres, qui peuvent être touchées et pénétrées par les forces vitales. »
(Entretien du 26 mai 1929)
De quel plan mental parlez-vous?
Du plan mental physique. Certainement pas du mental supérieur, car là, il n’y a pas de forces adverses. Il s’agit du mental qui s’occupe des choses matérielles.
Y a-t-il des êtres dans le monde mental?
Oui, beaucoup. Ils sont tout à fait indépendants, ils ont leur vie propre, des relations entre eux, comme dans les autres mondes. Seulement, pour une conscience physique, le temps et l’espace ne sont pas les mêmes dans le monde vital ou le monde mental et dans le monde physique. Par exemple, ceux qui sont dans la conscience physique, ont l’impression que les déplacements du mental sont instantanés — par rapport à la conscience supérieure ils ne sont pas instantanés, mais par rapport à la conscience physique ils sont instantanés, d’une rapidité extrême.
Les êtres du monde mental ont aussi une individualité propre, même une forme qui peut être permanente, s’ils choisissent d’en garder une. Leur forme est l’expression de leur pensée, et elle est suffisamment plastique pour pouvoir changer avec leur pensée, mais d’une continuité suffisante pour que l’on puisse les reconnaître. Si vous sortez de votre corps et que vous entriez dans le monde mental, vous pouvez rencontrer ces êtres, leur parler, même leur donner rendez-vous pour la prochaine fois!
Peuvent-ils jeter leur influence sur un être humain, comme le font les êtres du monde vital?
Beaucoup de formations essaient de se réaliser terrestrement, mais ces formations mentales sont généralement produites par les êtres humains, puis elles continuent à travailler dans le monde mental avec l’intention d’influencer la mentalité des êtres humains. Mais les êtres du plan mental proprement dit sont généralement des créateurs, et parce qu’ils sont des créateurs de formes, ils ne se soucient pas beaucoup d’influencer les autres formes — ils se contentent de s’exprimer par les formes qu’ils ont faites.
Y a-t-il une différence entre le « spirituel » et le « psychique » ? Est-ce que ce sont deux plans différents?
C’est un sujet de grande confusion dans la pensée humaine. Je crois que les systèmes philosophiques, yoguiques et autres se servent du mot « spirituel » d’une façon très vague et très lâche. Tout ce qui n’est pas physique est spirituel! Par rapport au monde physique, tous les autres mondes sont spirituels! Toute pensée, tout effort qui ne tend pas à la vie matérielle est un effort spirituel. Toute tendance qui n’est pas étroitement humaine et égoïste est une tendance spirituelle. C’est un mot que l’on met à toutes les sauces.
Je viens de lire ceci dans « L’Illustration » : « L’activité spirituelle par excellence est de lire et d’écrire. Le centre de la vie spirituelle est la Bibliothèque Nationale » !
C’est une spiritualité bon marché!
Après avoir parlé de la différence entre le « psychique » et le « spirituel » (Entretien du 26 mai 1929), Mère ajoute :
« Tant qu’il vous faut fonder votre compréhension sur des formes verbales, vous avez grande chance de vous tromper souvent sur le sens véritable; mais si, dans le silence mental, vous pouvez vous élever jusqu’au monde d’où les idées descendent pour prendre forme, de suite vous atteindrez à la compréhension. [...] sur les pures altitudes du mental inexprimé, on est libre; quand on y entre, on sort de soi-même et on pénètre dans le plan du mental universel où chaque monde mental individuel est plongé comme dans une mer immense. Là, vous pouvez comprendre complètement ce qui se passe en un autre et lire dans son mental comme si c’était le vôtre, parce que là, aucune séparation ne divise un mental d’un autre. C’est seulement lorsque vous vous unissez aux autres dans cette région, que vous pouvez les comprendre; autrement, vous n’êtes pas accordés, vous n’avez pas de contact. »
C’est seulement dans le silence que l’on peut se comprendre. Il arrive souvent que deux êtres parlent d’un certain sujet et, tout d’un coup, pour une raison quelconque, tous deux se taisent pendant un certain temps; puis, soudain, l’un dit un mot qui correspond exactement à ce que l’autre pensait. Ce sont des gens qui se comprennent dans le silence. Ils ont suivi la même courbe, ils sont arrivés au même résultat, et l’un complète la pensée de l’autre. Cela arrive souvent à ceux qui ont vécu longtemps ensemble et développé une sorte d’affinité mentale qui leur permet vraiment de se comprendre derrière les mots. J’ai connu des gens qui appartenaient à des pays différents — et vous savez que la façon de penser est très différente suivant les pays, la façon dont les idées se suivent est différente, contraire même à celle d’un autre pays —, mais j’ai eu des expériences avec des personnes de races très éloignées qui avaient réussi à s’accorder si bien mentalement qu’elles se comprenaient ainsi, sans mots.
Si l’un est silencieux et l’autre ne l’est pas, peut-on se comprendre?
C’est possible. Peut-être que celui qui est silencieux comprendra celui qui ne l’est pas!... Mais quand il y a ce plein accord, même s’il n’est pas permanent, quand on se trouve avec quelqu’un et que l’on suit une pensée assez loin pour sortir de l’agitation extérieure, si l’autre aussi a suivi la même pensée, on peut tout d’un coup se trouver d’accord sans avoir parlé ou sans avoir fait d’effort pour cela. Généralement, le silence arrive aux deux en même temps, ou presque — c’est comme si l’on glissait dans le silence. Bien sûr, il se peut aussi que l’un continue à faire du bruit dans sa tête, tandis que l’autre s’est arrêté, mais celui qui s’est arrêté aura beaucoup plus de chances de comprendre ce qui arrive à l’autre!
Quand on sort de la classe 16 on nous demande ce que tu as dit. Faut-il le dire?
Vous pouvez dire : « Écoutez, j’ai fait de mon mieux, mais je ne suis pas sûr d’avoir compris, et, si je vous répète ce qu’elle a dit, je suis à peu près certain que je déformerai ses paroles. » Comme cela vous êtes tranquille, « on the safe side ». on the safe side ».
Qu’est-ce qui caractérise la substance du monde psychique?
La substance du monde psychique est une substance qui lui est propre, qui a ses caractéristiques propres, psychiques : un sens immortel, complètement réceptif à l’influence divine, entièrement soumis à cette influence et imprégné par elle. C’est justement ce qui différencie le psychique des autres parties de l’être. Quand, par exemple, je parle d’organiser le mental et le vital autour du centre psychique, je ne veux pas dire qu’ils deviennent psychiques; ils restent vital et mental, mais ils sont organisés autour du psychique, comme une armée est organisée autour de son chef — elle ne devient pas le chef, elle lui obéit, n’est-ce pas. Eh bien, c’est la même chose; le vital et le mental sont organisés autour du psychique, ils reçoivent des ordres du psychique et les exécutent aussi bien qu’ils le peuvent. Mais leur substance ne devient pas une substance psychique pour autant. Ils peuvent être sous l’influence du psychique et prendre plus ou moins sa nature, mais pas sa substance.
Vous avez dit que nos corps pouvaient devenir réceptifs aux forces qui sont concentrées dans certains endroits ou certains pays. Mais peut-on avoir cette sensation physique sans une préparation préalable de la conscience? Ou est-ce vraiment une sensation spontanée, comme le chaud, le froid, la chair de poule, par exemple 17 ?
Si c’était le résultat d’une pensée ou d’une volonté, ce ne serait pas une expérience, cela n’aurait aucune valeur. Vous entendez, j’affirme d’une façon absolue que toute expérience qui est le résultat d’une pensée ou d’une volonté préconçue n’a aucune valeur du point de vue spirituel.
Mais n’étiez-vous pas dans un état pour ainsi dire « favorable » à cette sensation ?
Il y a des êtres qui vivent d’une façon constante dans une conscience supérieure, tandis que d’autres doivent faire un effort pour y entrer. Mais il s’agit de tout autre chose; dans l’expérience dont je parlais, ce qui faisait toute sa valeur, c’est que je ne m’y attendais pas du tout, du tout. Je savais très bien, j’étais depuis fort longtemps et d’une façon continue en relation « spirituelle », si je puis dire, avec l’atmosphère de Sri Aurobindo, mais je n’avais jamais pensé à la possibilité d’une modification de l’air physique et je ne m’y attendais pas le moins du monde, et c’était cela qui faisait toute la valeur de l’expérience, qui est venue comme cela, tout d’un coup, comme quand on entre dans un endroit d’une autre température ou d’une autre altitude... Je ne sais pas si vous savez que l’air que l’on respire n’est pas toujours le même et qu’il y a des vibrations différentes dans l’air d’un pays et dans l’air d’un autre, dans l’air d’un endroit et dans l’air d’un autre. Si l’on est habitué, justement, à avoir cette perception du physique subtil, on peut tout d’un coup dire : « Tiens, c’est de l’air comme en France » ou : « C’est de l’air du Japon. » C’est quelque chose d’indéfinissable, comme le goût ou l’odorat. Mais ce n’est pas cela, c’est une perception d’un autre sens. C’est un sens physique, ce n’est pas un sens vital ou mental ; c’est un sens du monde physique, mais ce sont d’autres sens que les cinq sens que nous avons d’ordinaire à notre disposition — il y en a beaucoup d’autres.
Au fait, pour que l’être physique — j’insiste, l’être physique — soit pleinement développé, il faut qu’il ait douze sens. C’est l’un de ces sens qui vous donne ce genre de perception. On ne peut pas dire que ce soit le goût, l’odorat, l’ouïe, etc., mais c’est quelque chose qui vous donne une impression très précise de la différence de qualité. Et c’est très précis, n’est-ce pas, aussi précis que de voir le noir et le blanc, c’est vraiment une perception sensorielle.
Généralement, quand on veut étudier l’occultisme, la première chose que fait le Maître, c’est de ne jamais vous en parler, de ne jamais vous l’expliquer, justement à cause de ce phénomène ridicule de la pensée qui commence à « penser » autour et vous fait avoir des « expériences », qui n’ont aucune valeur : ce sont des formations mentales dont vous avez été le jouet, c’est tout, elles n’ont pas de réalité.
Il faut se méfier terriblement de la pensée quand on veut entrer dans le monde des expériences. Il suffit que le mental soit seulement alerté, qu’il dise : « Tiens, qu’est-ce qui se passe? »... Alors il se peut que des choses se passent, mais ce n’est plus la chose, c’est une fabrication.
Première condition : savoir se taire. Et non seulement se taire avec sa langue, mais se taire dans la tête, garder la tête silencieuse. Si vous voulez une expérience vraie, sincère, sur laquelle vous pouvez fonder quelque chose, il faut savoir se taire, autrement on n’a rien que ce que l’on fabrique soi-même, ce qui est équivalent à zéro. Tout ce que l’on peut dire, c’est : « Tiens, comme ma pensée est formatrice! »
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