CWM (Fre) Set of 18 volumes
Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 of CWM (Fre) 471 pages 2009 Edition
French

Translations

ABOUT

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Entretiens - 1950-1951

The Mother symbol
The Mother

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Collection des œuvres de La Mère Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 471 pages 2009 Edition
French
 PDF   

1951




janvier




Le 20 janvier 1951

« Pour compléter ce mouvement de découverte intérieure, il sera bon de ne pas négliger le développement mental. Car l’instrument mental peut être, indifféremment, une grande aide ou un très grand obstacle. La mentalité humaine, à son état naturel, est toujours limitée dans sa vision, bornée dans sa compréhension, rigide dans ses conceptions. Il faut donc faire un effort constant pour l’élargir, l’assouplir et l’approfondir. »

(La Science de Vivre, Bulletin de novembre 1950)

Le malheur est que la plupart des gens, plus ils pensent, plus ils se croient supérieurs. Le mental est satisfait de soi et n’aspire pas beaucoup au progrès — il pense tout savoir. Et beaucoup de gens pensent que leur façon de penser est la meilleure; ils ne peuvent pas comprendre qu’il y a toujours plusieurs façons de penser un même sujet. Et plus leur pensée est forte et précise, plus ils sont convaincus qu’il y a une façon de penser. C’est pourquoi j’ai dit ici que certains exercices peuvent élargir votre pensée et vous donner l’habitude de voir les choses à plusieurs points de vue à la fois :

« Il est très nécessaire de considérer chaque chose à autant de points de vue que possible. Pour cela, il est un exercice qui donne beaucoup de souplesse et d’élévation à la pensée; voici en quoi il consiste : on pose une thèse en la formulant clairement, puis on lui oppose son antithèse avec la même précision. Ensuite, par la réflexion attentive, il faut élargir le problème ou s’élever au-dessus, jusqu’à ce que l’on ait trouvé la synthèse qui unisse les deux contraires en une idée plus vaste, plus haute et plus compréhensive. »

Posez-moi une thèse.

X — Thèse : Chacun porte sa croix dans le monde. Antithèse : Il y a des hommes qui sont au-dessus de toute affliction humaine.

Et la synthèse?

Y — Il y a une partie de l’être, en chacun, qui est audessus de l’affliction.

Z — Il y a tant d’hommes différents dans le monde.

W — La croix est nécessaire pour sauter par-dessus la souffrance.

Ce n’est pas une synthèse cela.

X — Dans ma thèse, j’ai parlé des gens « ordinaires »... Dans l’antithèse je parle des gens « extraordinaires ».

Oui, mais vous croyez que les gens extraordinaires n’ont pas de croix ! Même les êtres supérieurs ont leur croix à porter.

Il s’agit d’une différence de conscience. Chez les uns, ce sont les états de conscience extérieurs qui sont les plus développés; d’autres, au contraire, ont pris soin de développer les états de conscience supérieurs. Alors dire « chacun porte sa croix » est vrai pour la conscience extérieure (pour les événements matériels, pour les événements qui touchent l’être vital, l’être émotif et le mental), pour ces gens-là il y aura toujours un nombre considérable de catastrophes, d’autant plus que les catastrophes semblent être proportionnelles à la capacité des individus, elles ont l’air d’être dosées suivant leur capacité de supporter les choses. Il se pourrait précisément que ceux qui ont des capacités supérieures, aient comme un surplus de souffrances et de malheurs.

Mais il y a des gens qui sont au-dessus des malheurs, et pourtant les malheurs existent pour eux. Pourquoi? Parce que la conscience intérieure en eux est plus forte, plus développée que la conscience extérieure (je ne parle pas ici des êtres « transformés », car chez eux, n’est-ce pas, on peut envisager un état de choses où même l’être physique est au-dessus des souffrances; nous parlons des hommes tels qu’ils sont actuellement). Si le siège de votre conscience est situé à un endroit où ces choses extérieures n’existent pas, on peut dire que vous ne portez pas votre croix, parce que vous êtes au-dessus d’elle. Pourtant il y a des exceptions, des êtres humains qui sont au-dessus des afflictions et qui portent leur croix. Comment concilier ces deux choses apparemment contradictoires?

Les malheurs sont différents.

Non, les misères et les malheurs humains sont toujours de la même nature; il y a des souffrances qui proviennent de vousmême, des circonstances ou de l’état général; c’est-à-dire que l’on est soumis à ces souffrances depuis la naissance et que personne n’y échappe. Elles ne sont pas toujours de la même intensité, mais il y en a toujours. Il semble donc qu’il y ait contradiction, et pourtant c’est inexact! Car pour certaines gens c’est comme si cela n’existait pas, tout en existant! comme si cela n’était pas, tout en étant! Ni l’un ni l’autre ne sont complètement vrais, ni l’un ni l’autre ne sont complètement faux.

Il est un état de conscience humain (ce n’est pas encore surhumain, c’est vraiment humain) où les deux choses peuvent être concomitantes. On peut avoir des souffrances et on peut ne pas les sentir, être comme si elles n’existaient pas. C’est-à-dire qu’un malheur, une « croix » n’affecte que la conscience extérieure, le physique, le mental, le vital et le psychique — à vrai dire, le psychique est au-dessus de toute souffrance. Prenons un exemple très simple : une maladie. Un désordre physique fait souffrir, n’est-ce pas, parfois beaucoup, mais il y a des gens qui sont dans un état de conscience tel, que leurs souffrances physiques n’existent pas, elles ne sont pas réelles pour eux. C’est la même chose pour l’éloignement; si l’on aime quelqu’un et que l’on soit séparé de cette personne, on souffre — c’est l’une des souffrances les plus répandues, ce sont les attachements qui sont brisés; eh bien, dans un certain état de conscience le lien véritable entre deux êtres ne peut pas être brisé, car il n’appartient pas au domaine où les choses se brisent. Par conséquent, on est au-dessus de ce qui peut arriver.

Mais avant d’atteindre à un état de conscience supérieur, il y a un stade où l’on peut développer en soi la raison — une raison claire, précise, logique et assez objective dans sa vision des choses. Et quand on développe cette raison suffisamment, toutes les impulsions, tous les sentiments, tous les désirs, tous les bouleversements peuvent être mis en présence de cette raison et cela vous rend raisonnable. La plupart des gens, quand quelque chose les tourmente, deviennent très déraisonnables. Par exemple, quand ils sont malades, ils passent leur temps à dire : « Oh! comme je suis malade, comme c’est terrible! est-ce que cela va durer tout le temps comme cela ? » Et naturellement, cela devient de pire en pire. Ou quand un malheur leur arrive, ils s’écrient : « Ce n’est qu’à moi que ces choses arrivent! moi qui pensais que tout était beau avant », et ils ont des crises de larmes, des crises de nerfs. Eh bien, sans parler de surhomme, il y a dans l’homme une capacité supérieure, qu’on appelle la raison, qui peut regarder les choses calmement, froidement, raisonnablement. Et cette raison vous dit : « Ne vous tourmentez pas, cela n’améliorera rien; il ne faut pas se plaindre, il faut accepter la chose puisqu’elle est arrivée. » Alors on devient tout de suite plus calme. C’est une très bonne éducation mentale, cela développe le jugement, la vision, l’objectivité et, en même temps, cela agit très sainement sur votre caractère. Cela vous permet d’éviter le ridicule de vous laisser aller à vos crises et vous permet de vous conduire comme une personne raisonnable.

Il y a une chose très difficile pour le mental, mais qui est très importante, à mon avis : il ne faut jamais permettre à son mental de juger des choses et des hommes. Dire « cela est bon, cela est mauvais, ceci est bien et cela est mal, celui-là a tel défaut, celui-ci a telle mauvaise chose, etc. », c’est du jugement péjoratif.

Tous les gens qui exercent leur intelligence, plus ils sont intelligents, plus ils s’aperçoivent qu’ils ne savent rien du tout et qu’avec le mental on ne peut rien savoir. On peut penser d’une façon, juger d’une manière, voir d’une façon, mais on n’est jamais sûr de rien — et jamais on ne sera sûr de rien. On peut toujours dire « peut-être est-ce comme cela » ou « peutêtre est-ce comme ceci » et ainsi de suite, indéfiniment, parce que le mental n’est pas un instrument de connaissance.

Au-dessus des pensées, il y a les idées pures; les pensées servent à exprimer les idées pures. Et la Connaissance est bien au-dessus du domaine des idées pures, comme ces dernières sont bien au-dessus de la pensée. Il faut donc savoir remonter de la pensée à l’idée pure — et l’idée pure elle-même n’est qu’une traduction de la Connaissance. Et la Connaissance ne peut s’obtenir que par l’identification totale. Alors, quand vous vous mettez dans votre petite mentalité humaine, cette mentalité de la conscience physique qui fonctionne tout le temps, qui regarde tout, qui juge tout du haut de sa supériorité dérisoire, qui dit « cela est mauvais, cela ne doit pas être comme ça », vous êtes sûr de vous tromper, sans exception. Et le mieux est de se taire et de regarder bien les choses, et, petit à petit, vous formez au-dedans de vous des enregistrements et vous gardez tout cela sans prononcer aucun jugement. Quand vous êtes capable de garder tout cela au-dedans de vous, tranquillement, sans aucune agitation, et de le présenter tout tranquillement à la partie la plus haute de votre conscience en essayant de garder un silence attentif, et d’attendre, alors peut-être, lentement, comme venant de très loin et de très haut, quelque chose comme une lumière se manifestera, et vous saurez un peu plus de vérité.

Mais aussi longtemps que vous agitez vos pensées et les débitez en petits morceaux, vous ne saurez jamais rien. Je vous répéterai cela cent fois s’il le faut, mais je puis vous assurer que tant que vous n’êtes pas convaincu de cela, vous ne sortirez jamais de votre ignorance.

Y a-t-il un nombre exact d’idées pures?

Pouvoir savoir cela, il faut aller voir le Suprême et le lui demander! Je ne m’occupe pas de statistiques!

Voici une petite histoire. Un de mes amis avait fait un voyage aux Indes et on l’avait prié de raconter son voyage. Une vieille dame très croyante se trouvait là, elle lui a demandé : « Aux Indes, est-ce que les âmes sont comptées? » Il a répondu : « Oui. » « Combien sont-elles? » demandait la vieille dame. Et lui de répondre : « Une seule. »









Let us co-create the website.

Share your feedback. Help us improve. Or ask a question.

Image Description
Connect for updates