CWM (Fre) Set of 18 volumes
Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 of CWM (Fre) 471 pages 2009 Edition
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Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Entretiens - 1950-1951

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The Mother

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Collection des œuvres de La Mère Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 471 pages 2009 Edition
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1951




février




Le 22 février 1951

« Yoga veut dire union avec le Divin, et l’union s’effectue grâce à l’offrande; elle est fondée sur l’offrande de votre être au Divin. »

(Entretien du 28 avril 1929)

Quelle est la différence entre la soumission et l’offrande?

Les deux mots sont presque synonymes : « Je fais l’offrande de moi et je me soumets », mais dans le geste de l’offrande, il y a quelque chose de plus actif que dans le geste de la soumission. Malheureusement, « soumission » n’est pas le vrai mot. En anglais on dit surrender; entre les mots « surrender » et surrender » et « offrande » il n’y a guère de différence. Mais le mot français « soumission » donne l’impression de quelque chose de plus passif : on accepte; tandis que l’offrande est un don — un don volontaire.

Quel est le sens exact du mot « consécration » ?

« Consécration » a généralement un sens plus mystique, mais ce n’est pas absolu. Une consécration totale signifie un don total de son être; c’est donc l’équivalent du mot « surrender », non surrender », non du mot « soumission », qui donne toujours l’impression que l’on « accepte » d’une façon passive. On sent une flamme dans le mot « consécration », une flamme plus grande même que dans le mot « offrande ». Se consacrer, c’est « se donner à une action »; donc au sens yoguique, c’est se donner à une œuvre divine avec l’idée d’accomplir l’Œuvre divine.

Vous avez dit : « Quand votre résolution a été prise, quand vous avez décidé que votre vie entière serait consacrée au Divin, il vous reste encore à vous en souvenir à chaque moment et à la mettre à exécution dans tous les détails de votre existence. Vous devez sentir à chaque pas que vous appartenez au Divin; vous devez avoir constamment l’expérience que, dans tout ce que vous pensez et faites, c’est toujours la Conscience divine qui agit à travers vous. Dorénavant, vous n’avez plus rien que vous puissiez appeler vôtre; vous sentez que toutes choses viennent du Divin, et qu’il vous faut les retourner à leur source. Quand vous êtes à même de comprendre et d’éprouver cela, alors, même la plus petite chose, à laquelle vous n’attachiez auparavant que peu ou pas d’importance et de soin, cesse d’être triviale ou insignifiante; elle devient pleine de sens et ouvre devant vous un vaste horizon d’observation et d’étude. »

Parce que le moindre détail de la vie et de l’action, chaque mouvement de la pensée, de la sensation même, du sentiment, qui sont normalement de peu d’importance, de la seconde où on les considère en se demandant : « Est-ce que j’ai pensé cela comme une offrande au Divin, est-ce que j’ai senti cela comme une offrande au Divin?... », si l’on se rappelle cela à toute minute de la vie, l’attitude est toute différente de celle que l’on avait avant. Cela devient très vaste; c’est une chaîne d’innombrables petites choses qui chacune ont leur place, tandis qu’avant on les laissait passer sans s’en apercevoir. Cela élargit le champ de la conscience. Si vous prenez une demi-heure de votre vie et la considérez avec cette question : « Est-ce une consécration au Divin? », vous verrez que les petites choses deviennent une grande chose et vous aurez l’impression que la vie s’agrandit et s’illumine.

L’identification est le but du yoga. Peut-on dire que la soumission soit la première étape et l’offrande, la seconde?

Non, certains commencent par une offrande et finissent par une soumission. Cela dépend du caractère de chacun. On peut, peut-être, commencer par avoir un sentiment d’infériorité — on est un peu écrasé par la grandeur du Divin, et, après, on se sent un peu plus libre et on donne avec joie ce que l’on est. Ce n’est pas toujours le cas. Beaucoup commencent par le don; pour eux, le mouvement le plus facile est de se donner. C’est un don assez général au début, puis il faut faire un effort, parfois, pour se soumettre dans le détail; on peut se donner avec beaucoup d’enthousiasme, mais quand il faut à chaque pas se soumettre à la Volonté supérieure, cela devient plus difficile.

L’offrande n’implique-t-elle pas la soumission?

Pas du tout. On peut donner pour la joie de donner, sans aucune idée de se soumettre. Dans un mouvement d’enthousiasme, quand on a perçu quelque chose d’infiniment supérieur à soi, on peut se donner dans un élan, mais quand il s’agit de vivre cela à chaque minute, de se soumettre à chaque minute à la Volonté supérieure et que chaque minute implique cette soumission, c’est plus difficile. Mais si par « offrir » vous entendez faire l’offrande intégrale de tous vos mouvements, de toutes vos activités, cela équivaut à la soumission, sans l’impliquer nécessairement; mais alors ce n’est plus un mouvement que l’on fait dans l’enthousiasme, c’est quelque chose qui doit se réaliser dans le détail. On peut dire que tout mouvement fait dans l’ardeur et l’enthousiasme, est relativement facile (cela dépend de l’intensité du mouvement en vous), mais quand il s’agit de réaliser son aspiration à chaque minute de la vie et dans tous les détails, l’enthousiasme recule un peu et on sent la difficulté.

Y a-t-il une expérience qui prouve que l’on vit dans la présence du Divin?

Une fois que l’on vit dans la présence du Divin, on ne questionne plus. Cela porte sa propre certitude — on sent, on sait, et il devient impossible de questionner. On vit dans la présence du Divin et c’est pour vous un fait absolu. Jusque-là, on demande, parce que l’on n’a pas l’expérience, mais une fois que vous avez l’expérience, elle a une autorité telle que cela ne se discute pas. Celui qui dit : « Je pense que je vis dans la présence du Divin, mais je n’en suis pas sûr », n’a pas eu l’expérience véritable, car dès que l’on a le choc intérieur de cette expérience, il n’y a plus de question possible. C’est comme ceux qui demandent : « Quelle est la Volonté divine? » Tant que vous n’avez pas perçu cette Volonté, vous ne pouvez pas savoir. On peut en avoir une idée par déduction, conclusion, etc., mais une fois que vous avez senti le contact précis avec la Volonté divine, cela ne se discute pas non plus — on sait.

J’ajoute, pour qu’il n’y ait pas de malentendu : toute expérience ne vaut que dans la mesure de la sincérité de celui qui l’a. Certains ne sont pas sincères et fabriquent des expériences merveilleuses, et ils s’imaginent qu’ils les ont. Je laisse tout cela de côté, ce n’est pas intéressant. Mais pour les gens sincères, qui ont une expérience sincère, une fois que vous avez l’expérience de la Présence divine, le monde entier peut vous dire que ce n’est pas vrai et vous ne bougerez pas.

Si vous n’êtes pas sincère, vous pouvez avoir des expériences merveilleuses, mais qui n’ont aucune valeur, ni pour vous ni pour les autres. Il faut se méfier beaucoup de sa pensée, car le mental est un constructeur merveilleux et il peut vous donner des expériences merveilleuses par son seul travail de formation; mais ces expériences-là n’ont pas de valeur. Il est donc préférable de ne pas savoir d’avance ce qui va arriver. Car même avec une grand volonté d’être sincère, le mental fabrique tellement et si bien qu’il peut vous présenter un tableau merveilleux ou même vous jouer une comédie splendide, sans que vous vous en aperceviez, par son seul pouvoir de formation, et c’est très difficile de distinguer. Donc, une condition essentielle pour avoir des expériences vraies : laisser cette machine-là en repos; moins elle bouge, mieux cela vaut, et méfiez-vous de tout ce qu’il vous imagine.

Quelle est la différence entre l’aspiration et une demande?

Quand on a éprouvé les deux, on peut facilement faire la distinction. Il y a dans l’aspiration ce que je pourrais appeler une flamme désintéressée, qui n’existe pas dans le désir. Votre aspiration n’est pas un retour sur soi — le désir est toujours un retour sur soi. Du point de vue purement psychologique, l’aspiration est un don de soi, toujours, tandis que le désir est toujours quelque chose que l’on tire à soi; l’aspiration est quelque chose qui se donne, pas nécessairement dans la forme de la pensée, mais dans le mouvement, dans la vibration, dans l’élan vital.

L’aspiration vraie ne vient pas de la tête; même quand elle se formule par une pensée, elle s’élance comme une flamme du cœur. Je ne sais pas si vous avez lu les articles que Sri Aurobindo a écrits sur les Védas. Quelque part il explique que ces hymnes n’avaient pas été écrits avec la tête, qu’ils n’étaient pas, comme on le pense, des « prières », mais l’expression d’une aspiration qui était un élan, comme une flamme qui venait du cœur (bien que ce ne soit pas le « cœur », mais le centre psychologique de l’être, pour employer les mots exacts). Ce n’était pas « pensé », les mots n’étaient pas mis sur l’expérience; l’expérience venait toute formulée, avec les mots précis, exacts, indiscutables — ils ne pouvaient pas être changés. C’est le caractère même de l’aspiration : vous ne cherchez pas à la formuler, elle jaillit de vous comme une flamme toute prête. Et s’il y a des mots (parfois il n’y en a pas), ils ne peuvent pas être changés : on ne peut pas remplacer un mot par un autre, chaque mot est celui qui convient. Quand l’aspiration est formulée, elle l’est catégoriquement, absolument, sans possibilité de changement. Et c’est toujours quelque chose qui s’élance et qui se donne, tandis que le caractère même du désir est de tirer à soi.

La différence essentielle entre l’amour dans l’aspiration et l’amour dans le désir, est que l’amour dans l’aspiration se donne entièrement et ne demande rien en échange — il ne réclame pas; tandis que l’amour dans le désir se donne aussi peu que possible, demande autant que possible, il tire à soi et il réclame toujours.

L’aspiration donne toujours de la joie, n’est-ce pas?

Plutôt un sentiment de plénitude — « joie » est un mot qui trompe; un sentiment de plénitude, de force, de flamme intérieure qui vous remplit. L’aspiration peut vous donner de la joie, mais une joie très spéciale, qui n’a rien d’excité.

Est-ce que l’âme et l’être psychique sont une seule et même chose?

Cela dépend de la définition que l’on donne aux mots. Dans la plupart des religions, et peut-être aussi des philosophies, on appelle « âme » l’être vital, car on dit que « l’âme quitte le corps », alors que c’est l’être vital qui quitte le corps; on parle de « sauver les âmes », de « mauvaises âmes », de « racheter les âmes »..., mais tout cela s’applique à l’être vital, car l’être psychique n’a pas besoin d’être sauvé!... il ne participe pas aux fautes de la personne extérieure, il est libre de toute réaction.

Lorsqu’on travaille et que l’on veut faire de son mieux, il faut beaucoup de temps, mais généralement nous n’avons pas beaucoup de temps : nous sommes pressés. Comment donc faire de son mieux quand on est pressé?

C’est un sujet très intéressant dont je voulais vous parler en détail, un jour. Généralement, quand les gens se dépêchent, ils ne font pas complètement ce qu’ils ont à faire ou ils font mal ce qu’ils font. Eh bien, il y a une troisième façon, et c’est d’intensifier sa concentration. Si l’on fait cela, on peut gagner la moitié du temps, même dans un temps très court. Prenons un exemple très ordinaire : prendre son bain et s’habiller; le temps qu’il faut varie avec les gens, n’est-ce pas, mais disons qu’il faut une demi-heure pour tout faire sans perdre son temps et sans se dépêcher. Alors, si vous êtes pressé, de deux choses l’une : vous vous lavez moins bien ou vous vous habillez mal ! Mais il y a une autre façon — concentrer son attention et son énergie, penser à ce que l’on fait et pas à autre chose, ne pas faire un mouvement de trop, faire le mouvement exact de la façon la plus exacte, et (c’est une expérience vécue, je peux vous en parler avec certitude) vous pouvez faire en quinze minutes ce que vous faisiez avant en une demi-heure, aussi bien, parfois mieux, sans rien oublier, sans rien laisser de côté, simplement par l’intensité de la concentration.

Et c’est la meilleure réponse à tous ceux qui disent : « Oh! si l’on veut faire les choses bien, il faut du temps. » Ce n’est pas vrai. Pour tout ce que vous faites — étudier, vous amuser, travailler —, il n’y a qu’une solution : augmenter son pouvoir de concentration. Et quand vous arrivez à cette concentration, ce n’est plus fatigant. Naturellement, au début cela produit une tension, mais quand vous en avez pris l’habitude, la tension diminue, et un moment arrive où ce qui vous fatigue, c’est de ne pas faire comme cela, de vous disperser, de vous laisser avaler par toutes sortes de choses et de ne pas vous concentrer sur ce que vous faites. On peut arriver même à faire mieux et plus vite, par le pouvoir de la concentration. Et de cette manière on peut se servir du travail comme d’un moyen de développement; autrement, on a cette idée vague qu’il faut faire le travail « avec désintéressement », mais il y a là beaucoup de danger, car on a vite fait de confondre le désintéressement avec l’indifférence.









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