CWM (Fre) Set of 18 volumes
Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 of CWM (Fre) 471 pages 2009 Edition
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Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Entretiens - 1950-1951

The Mother symbol
The Mother

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Collection des œuvres de La Mère Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 471 pages 2009 Edition
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1951




février




Le 24 février 1951

L’autre jour, j’ai dit que la plupart du temps les gens n’avaient pas leur être psychique au-dedans d’eux. Je voudrais m’expliquer plus en détail... Il faut se souvenir que les êtres intérieurs ne sont pas dans la troisième dimension. Si vous ouvrez votre corps, vous ne trouverez que les viscères du corps, qui sont dans la troisième dimension. Les êtres intérieurs sont dans une autre dimension, et quand je dis que certaines personnes n’ont pas leur être psychique au-dedans d’elles, je ne veux pas dire qu’il n’est pas au centre de leur être, mais que leur conscience extérieure est si petite, si limitée, si obscure qu’elle n’est pas capable de garder une relation, non seulement consciente mais intime avec l’être psychique qui la déborde de toutes façons; il est tellement plus haut et plus profond que les autres consciences extérieures, qu’il n’y a pas de relation de qualité ou de nature entre eux. Les religions disent que vous avez une étincelle divine en vous — elles ont bien fait d’appeler cela « une étincelle », car elle est si petite, n’est-ce pas, qu’on peut la situer n’importe où dans le corps sans difficulté. Mais cela ne veut pas dire que ce soit dans le corps : c’est à l’intérieur de la conscience dans une autre dimension, et il y a des êtres qui ont un contact avec elle, d’autres qui ne l’ont pas. Mais si vous en venez à la Présence divine dans l’atome, l’image est plus facile à comprendre, car là on touche à un domaine si infinitésimal que l’on est à une frontière où l’on ne peut plus distinguer entre deux, trois, quatre ou cinq dimensions. Si vous étudiez la physique moderne, vous comprendrez ce que je veux dire. Les mouvements qui constituent l’atome sont tellement, dans l’ordre des grandeurs, imperceptibles, que l’on ne peut pas les comprendre avec notre compréhension de la troisième dimension, d’autant qu’ils suivent des lois qui échappent complètement à cette notion de troisième dimension.

Alors, si vous vous réfugiez là, vous pouvez dire que l’étincelle divine est au centre de chaque atome, et vous ne serez pas loin de la vérité; mais je ne parlais pas de l’étincelle divine, je parlais de l’être, de la conscience psychique, ce qui est autre chose. L’être psychique est une entité qui a une forme; il s’est groupé autour d’une conscience centrale et, ayant une forme, il a une dimension, mais une dimension d’une autre nature que la troisième dimension de la conscience extérieure.

On dit souvent que les enfants entrent en possession de leur être psychique vers l’âge de sept ans. Qu’est-ce que cela veut dire exactement?

Ce n’est pas exact. Il y a des personnes dont l’être psychique veille à la formation avant leur naissance, avant même qu’elles ne soient dans le ventre de leur mère. Il y a des enfants dont l’être psychique entre en contact avec eux à la minute même où ils poussent leur premier cri. Il y a aussi des personnes dont l’être psychique vient quelques heures après la naissance, ou quelques jours, ou quelques semaines, quelques mois, quelques années ou... jamais!

Vous m’avez dit une fois qu’il ne faut pas demander à un enfant de faire un effort mental avant l’âge de sept ans.

C’est tout à fait différent. Il s’agit là seulement de la formation du cerveau physique, qui se fait lentement, peu à peu. Si vous demandez à un cerveau en formation un effort qui dépasse sa capacité, vous le fatiguez, vous le surmenez ou vous le rendez malade.

Vous dites que l’être psychique est la même chose que l’étincelle divine...

Non, je n’ai jamais dit cela — ce serait une ânerie! L’être psychique est organisé autour de l’étincelle divine. L’étincelle divine est une, universelle, la même partout et en toute chose, une et infinie, semblable à elle-même. On ne peut pas dire que c’est un être — c’est l’Être, si vous voulez, mais pas un être. Naturellement, si l’on remonte à l’origine, on peut dire qu’il n’y a qu’une âme, car l’origine de toutes les âmes est la même, comme l’origine de tout l’univers est la même, comme l’origine de toute la création est la même. Tandis que l’être psychique est un être individuel, personnel, avec son expérience propre, son développement propre, sa croissance propre, son organisation propre; seulement, cette organisation est le produit de l’action d’une étincelle divine centrale.

Mais le jour où un être extérieur (physique, mental, vital) entre en contact direct et constant avec l’être psychique, on peut dire de la même façon que l’être physique de cette personne est organisé par la conscience divine centrale. De la minute où vous vous mettez en relation avec elle, que vous vous soumettez à elle, vous êtes organisé par elle, par la conscience divine centrale; on peut dire que le corps est organisé par elle, mais c’est un corps, ce n’est pas une âme. Ce n’est pas le fait d’être organisé par cette étincelle divine qui fait l’âme.

Y a-t-il un être psychique dans les atomes?

Non, il n’est pas encore là. On peut dire qu’il y a une possibilité de conscience psychique dans la Matière — la diffusion de la Conscience divine n’avait pas d’autre objet : rendre possible une organisation qui soit sous l’influence directe du Divin. C’est pourquoi cela passe au-dessus de tous les mondes de désordre11 .

On peut donc dire que l’origine de l’âme est aussi dans l’atome, dans tous les éléments constitutifs de l’atome, mais c’est l’origine seulement... Il faut vous dire que quand il est pleinement formé, l’être psychique a une forme distincte, qui correspond à notre forme physique. Ce n’est pas tout à fait semblable, mais il a une forme définie. Chaque être psychique est différent d’un autre — ils ne sont pas tous taillés, moulés sur le même modèle. Ils sont différents, ils ont une individualité, une personnalité.

Mère reprend sa lecture : « Est-ce que beaucoup de gens se souviennent d’avoir passé de l’autre côté et d’être revenus encore une fois? »

(Entretien du 28 avril 1929)

J’étais gravement malade, inconscient pendant deux heures, et j’avais l’impression que je passais de l’autre côté, que j’étais dans un monde différent. Quand je suis revenu à moi, j’avais l’impression d’avoir fait un grand voyage dans un monde très différent de celui où je vivais normalement.

C’était une extériorisation partielle; ce n’était pas une extériorisation totale, qui cause vraiment la mort. Si l’on est sorti tout à fait, c’est-à-dire s’il y a une séparation complète du corps, que l’on est véritablement mort, et que l’on revienne après, cela cause une souffrance si intense qu’on ne peut pas l’oublier. On dit que les enfants crient quand ils viennent au monde, parce que c’est le premier contact avec l’air qui les fait crier, mais je crois que c’est autre chose. Cette rentrée dans le corps cause une sorte de friction, car il faut que ce soit quelque chose de très matériel qui sorte pour que cela cause la mort, quelque chose de plus matériel même que le physique subtil, et cette friction est extrêmement douloureuse. Autrement, on peut être extérieurement inconscient, mais on n’est pas mort pour autant. C’est seulement quand quelque chose d’extrêmement matériel sort du corps et que tous les liens sont brisés, qu’il y a vraiment « mort ». Et c’est pour cela (je crois que l’on commence à le découvrir) que les gens ne meurent pas avant six ou sept jours après leur mort. C’est-à-dire qu’ils ne sont pas « morts » aussi longtemps que le corps reste intact, mais seulement quand une partie du corps commence à se décomposer. Donc, pendant cette période, quelqu’un qui a la connaissance, le pouvoir et la capacité nécessaires peut « ressusciter » une personne dans cet état. Je crois que cela explique la plupart des cas de résurrection « miraculeuse ».

Une personne était morte. Les docteurs ont massé le cœur et quelque temps après la personne a ressuscité.

Oui, dans ce domaine-là on est en train de faire des « merveilles »!

(Mère poursuit sa lecture) « On se souvient [du passage de l’autre côté] quand on a atteint un certain état de conscience. Il n’est pas très difficile de toucher cet état partiellement, pour un court moment; en méditation profonde, en rêve, dans une vision, on peut avoir la sensation ou l’impression d’avoir déjà vécu dans une vie antérieure, d’avoir eu une expérience similaire, d’avoir connu telle ou telle vérité. Mais ce n’est pas une complète réalisation; pour l’obtenir, on doit avoir atteint, intérieurement, la conscience permanente, celle qui a toujours été et sera toujours, et qui relie entre elles toutes les existences, passées, présentes et futures. »

Il faut toujours se méfier des gens qui vont se promener dans un domaine mental ou vital quelconque, puis vous racontent des histoires en s’imaginant se souvenir de leurs vies antérieures. On connaît l’exemple classique de cette dame bien connue qui racontait ses vies depuis le moment où elle était singe! Je peux vous garantir que c’est de la pure imagination, car il est impossible de se souvenir comme cela.

Voici ce qui se produit. Prenons une étincelle divine qui, par attraction, par affinité et sélection, groupe autour d’elle un commencement de conscience psychique (ce travail est déjà très perceptible dans les animaux — ne croyez pas que vous êtes des êtres exceptionnels, que vous seuls avez un être psychique et que tout le reste de la création n’en a pas! cela commence dans le minéral ; c’est un peu plus développé dans le végétal et, chez les animaux, il y a une première lueur de présence psychique). Puis vient un moment où cet être psychique est suffisamment développé pour avoir une conscience indépendante et une volonté personnelle. Alors, après avoir eu d’innombrables vies plus ou moins individualisées, il devient conscient de luimême, de ses mouvements et du milieu qu’il a choisi pour son développement. Arrivé à un certain état de perception, il décide — généralement à la dernière minute de la vie qu’il vient de mener sur terre — des conditions dans lesquelles se passera sa vie suivante. Ici, je dois vous dire une chose très importante : l’être psychique ne peut progresser et se former que dans la vie physique et sur la terre. Dès qu’il quitte un corps, il entre dans le repos, qui dure plus ou moins longtemps suivant son propre choix et son degré de développement — un repos d’assimilation, de progrès passif pour ainsi dire, un repos de croissance passive qui permettra à ce même être psychique de passer à de nouvelles expériences et de faire des progrès plus actifs. Mais après avoir fini une existence (qui généralement ne se termine que lorsqu’il a fait ce qu’il voulait faire), il aura choisi le milieu où il naîtra, l’endroit de la terre approximatif où il naîtra, les conditions et le genre de vie où il naîtra, et un programme très précis des expériences par lesquelles il devra passer pour pouvoir faire le progrès qu’il veut faire.

Je vais vous donner un exemple tout à fait concret. Prenons un être psychique qui a décidé, pour une raison quelconque, d’entrer dans le corps d’un être destiné à devenir roi, parce qu’il y a toute une série d’expériences qu’il ne peut avoir que dans ces conditions. Après être passé par ces expériences de roi, il s’aperçoit qu’il y a tout un domaine où il ne peut pas faire de progrès du fait même des conditions de vie où il se trouve. Alors, quand il a fini son séjour sur la terre et qu’il décide de s’en aller, il décide que dans sa prochaine vie il naîtra dans un milieu moyen et dans des conditions moyennes, ni inférieures ni supérieures, mais telles que le corps qu’il habitera sera libre de faire ce qu’il veut. Car je ne vous apprends rien en vous disant que la vie des rois est une vie d’esclave; un roi est obligé de se soumettre à tout un protocole et à toutes sortes de cérémonies pour garder son prestige (c’est peut-être très agréable pour les gens vaniteux, mais pour un être psychique ce n’est pas agréable, car cela lui enlève la possibilité d’un grand nombre d’expériences). Ayant donc décidé ainsi, il porte en lui tous les souvenirs que peut lui donner une vie royale et il se repose pendant le temps qu’il juge nécessaire (ici, je dois dire que je parle d’un être psychique exclusivement occupé de lui-même, non d’un être psychique qui s’est consacré à une œuvre, parce que, dans ce cas, c’est l’œuvre qui décide des vies futures et de leurs conditions; je parle d’un être psychique qui est en train de parachever son développement). Donc, il décide qu’à un certain moment il prendra un corps. Ayant déjà fait un certain nombre d’expériences, il sait que dans tel pays, c’est une partie de la conscience qui s’est développée, dans tel autre pays, c’est une autre partie, et ainsi de suite; alors il choisit l’endroit qui lui offre des possibilités de développement convenables : le pays, les conditions de vie, la nature approximative des parents, et aussi les conditions du corps lui-même, sa construction physique et les qualités dont il a besoin pour faire ses expériences. Il se repose, puis au moment voulu, se réveille et projette sa conscience sur la terre en la centralisant dans le domaine et dans les conditions choisis — à peu près, n’est-ce pas, il y a une petite marge, car de la conscience psychique on est trop loin de la conscience physique matérielle pour pouvoir voir avec la clarté de votre vision; c’est une approximation. Il ne se trompe pas sur le pays ni sur le milieu et il voit bien les vibrations intérieures des gens choisis, mais il se peut qu’il y ait un petit flottement. Mais si, à ce moment précis, il y a sur terre un couple, ou plutôt une femme qui a elle-même une aspiration psychique et qui, pour une raison quelconque, sans même savoir pourquoi ni comment, voudrait avoir un enfant exceptionnel remplissant certaines conditions exceptionnelles; si à ce moment-là, cette aspiration a lieu sur la terre, cela produit une vibration, une lumière psychique que l’être psychique voit immédiatement, et, sans hésitation, il se précipite vers elle. Alors, à partir de ce moment (qui est le moment de la conception), il veille à la construction de l’enfant, afin que cette construction soit aussi favorable que possible au plan qu’il a ; par conséquent, son influence est là sur l’enfant avant même que celui-ci paraisse dans le monde physique.

Si tout va bien, s’il n’y a pas d’accident (il peut toujours y avoir des accidents), si tout va bien au moment où l’enfant va naître, la force psychique (peut-être pas la totalité, mais une partie de la conscience psychique) se précipite dans l’être et, dès son premier cri, lui donne l’impulsion vers les expériences qu’elle veut que l’enfant acquière. Il en résulte que même si les parents ne sont pas conscients, même si l’enfant dans sa conscience extérieure n’est pas tout à fait conscient (un petit enfant n’a pas le cerveau nécessaire pour cela, il se forme petit à petit, lentement), malgré cela, l’influence psychique aura la possibilité de diriger tous les événements, toutes les circonstances de la vie de cet enfant, jusqu’au moment où il sera capable d’entrer en rapport conscient avec son être psychique (physiquement, c’est généralement entre quatre et sept ans, parfois plus tôt, parfois presque tout de suite, mais là nous avons affaire à des enfants qui ne sont pas des « enfants », qui ont des capacités dites « surnaturelles » — ce n’est pas « surnaturel », c’est simplement l’expression de la présence de l’être psychique). Mais il y a des gens qui n’ont pas eu la chance, ou la bonne fortune si l’on peut dire, de rencontrer quelqu’un, physiquement, qui puisse les renseigner; et cependant ils ont le sentiment que tous les pas de leur existence, toutes les circonstances de leur vie sont arrangés par quelqu’un de conscient, afin qu’ils puissent faire le maximum de progrès. Quand ils ont besoin d’une certaine circonstance, elle arrive; quand ils ont besoin de rencontrer certaines personnes, elles arrivent; quand ils ont besoin de lire certains livres, ils les trouvent à leur portée. Tout s’arrange comme cela, comme si quelqu’un veillait sur eux pour que leur vie contienne le maximum de possibilités de développement. Ces gens-là peuvent très bien dire : « Mais qu’est-ce que c’est qu’un être psychique? », car personne ne s’est jamais servi de ces mots pour leur parler, ou ils n’ont trouvé personne qui puisse leur expliquer tout cela ; mais pour eux, il suffit parfois d’une rencontre, d’un regard pour qu’ils se réveillent; un mot suffit pour qu’ils se souviennent : « Mais je savais tout cela ! »

C’est ce qui se passe exactement pour un être psychique qui est arrivé vers le dernier stade de son développement. Après cela, il ne sera plus lié par la nécessité de venir sur la terre, il aura achevé son développement et pourra choisir librement de se consacrer à l’Œuvre divine ou d’aller se promener ailleurs, c’est-à-dire dans les mondes supérieurs. Mais généralement, arrivé à ce stade, il se souvient de tout ce qui lui est arrivé et il se rend compte de la grande nécessité de venir au secours de ceux qui se débattent encore dans les difficultés. Les êtres psychiques comme ceux-là font don de leur existence à l’Œuvre divine — ce n’est pas absolu, inévitable, ils ont le libre choix, mais quatre-vingt-dix fois sur cent, c’est ce qu’ils font.

Mais dans les vies ordinaires — et par là je veux dire la vie d’une certaine élite de gens suffisamment développés — le contact entre l’être extérieur et l’être psychique est tout à fait intermittent; il se produit à la suite de certaines expériences ou de certaines nécessités intérieures. À ce moment-là, l’être psychique est « en avant », dit Sri Aurobindo, c’est-à-dire qu’il vient à la surface de la conscience, il est en contact direct avec certaines circonstances matérielles, avec des formes, des mots, des sons, etc., pendant un temps très court; alors il enregistre tout cela, comme une photographie, comme un cinéma, mais ce n’est qu’une minute, quelques moments dans une vie. Ces moments peuvent se répéter plusieurs fois, mais ils ne durent pas; et c’est de cela que l’être psychique se souvient; et quand vous avez des souvenirs psychiques véritables, sincères, spontanés, pas fabriqués par le mental ou le vital, c’est-à-dire purement psychiques, exacts, votre souvenir est intermittent. Et il est souvent très difficile

de situer vos vies antérieures, de dire : « J’étais ceci ou cela »; c’est seulement quand l’expérience psychique a lieu à un moment très important de l’existence et que tout un ensemble de circonstances vous donne pour ainsi dire la clef de l’histoire (des costumes, des mots prononcés, des usages ou un environnement qui vous donnent la clef) que vous pouvez dire : « Tiens, cette vie-là, je l’ai vécue. » Mais si quelqu’un vient vous raconter toutes ses vies antérieures depuis le singe, avec une masse de détails, vous pouvez être sûr que c’est un farceur!

Vous avez parlé du « hasard » de la rencontre d’un être psychique et de ce qui sera son être physique.

Non, j’ai dit « accident »; un accident n’est pas un hasard.

Dans la vie, il y a toujours conflit entre des forces opposées, et le résultat de ce conflit n’est pas toujours prévu, sauf quand on est conscient dans la conscience la plus haute. On ne peut pas prévoir le résultat d’un conflit avec une conscience qui ne dépasse pas la conscience humaine, alors on appelle cela un « accident ». Ce n’est pas un hasard, ce n’est même pas un accident sans raison, mais un accident qui est causé par des raisons que l’on n’est pas en état de prévoir.

En rêve, j’ai cru voir des images d’une vie antérieure d’ascète.

Il y a une telle suggestion ici [en Inde] que pour vivre la vie spirituelle il faut adopter la vie de sannyâsî, que c’est peut-être la cause de vos images. En tout cas, si c’était vraiment une vie antérieure, ce n’était pas la dernière. Vous avez eu sans doute des vies intermédiaires, car il est rare qu’un être se trouve plusieurs fois de suite dans un même pays — ce ne serait pas très profitable. Si ç’avait été une vie d’ascète du temps des premiers chrétiens, par exemple, vous auriez remarqué certains détails : la couleur différente de votre peau, un costume, etc., tandis que, probablement, vous avez vu les images habituelles de la vie indienne... Tout est possible, n’est-ce pas. L’univers est constitué de telle manière que tous les possibles peuvent s’y réaliser; mais comme je l’ai dit, il est rare que l’on naisse plusieurs fois dans un même pays, sauf si c’est pour accomplir une œuvre spéciale, dans un but spécial; et alors, il est très rare qu’on ne le sache pas, car cela veut dire que l’être psychique est pleinement formé et que c’est lui qui a choisi de revenir dans le même pays pour faire une œuvre spéciale ou continuer ce qu’il avait déjà commencé.

Beaucoup de gens ont eu une vie antérieure ascétique, car la suggestion collective est très forte ici. Il est très rare que l’on ne pense pas que, pour se perfectionner et vivre une vie spirituelle, il faille quitter le monde.

Il y a aussi des rêves symboliques et prémonitoires, mais il arrive rarement que les rêves contiennent de vrais souvenirs de vies antérieures, car pour cela il faut rêver dans sa conscience psychique, et il n’y a pas beaucoup de gens qui en soient capables — on rêve dans la conscience mentale ou vitale, mais c’est rare que l’on rêve dans la conscience psychique. Cela peut arriver, mais c’est rare.

Parfois, il y a des rêves que l’on prend pour des souvenirs et qui ne sont que des symboles : ce que l’on voit provient d’une formation mentale qui s’objective sur un écran intérieur et qui vous joue une scène, pour ainsi dire, à laquelle vous participez.

Ici, en Inde, il est fréquent que les enfants naissent dans un village et donnent, très jeunes, des précisions sur le village où ils ont vécu avant, sur leurs parents, etc. Est-ce vrai?

Oui, mais généralement ce sont des enfants qui sont morts enfants ou très jeunes et dont la vie précédente n’était pas pleinement écoulée. Cela peut arriver.

En quoi consiste le progrès de l’être psychique?

L’individualisation, la capacité de prendre toutes les expériences et de les organiser autour du centre divin.

Le but de l’être psychique est de former un être individuel, individualisé, « personnalisé » autour du centre divin. Normalement, toutes les expériences de la vie extérieure (à moins que l’on ne fasse un yoga et que l’on devienne conscient) se passent sans organiser l’être intérieur, tandis que l’être psychique organise ces expériences par séries. Il veut réaliser une certaine attitude envers le Divin. Il cherche donc toutes les expériences favorables afin d’avoir la série complète des occasions, si l’on peut dire, qui lui permettront de réaliser cette attitude envers le Divin. Prenez quelqu’un, par exemple, qui veut avoir l’expérience de la noblesse — une noblesse qui fait que vous ne pouvez pas agir comme un être ordinaire, qui vous infuse une vaillance, un courage, que l’on peut presque prendre pour de la témérité parce que l’attitude, l’expérience exige que l’on affronte le danger sans montrer la moindre crainte. Je vous disais tout à l’heure que je vous expliquerais ce que l’on peut acquérir quand on entre dans un corps de roi. Un roi est un homme ordinaire, n’est-ce pas, comme tous les autres, il n’a pas de conscience spéciale, mais, de par les nécessités de sa vie, parce qu’il est une sorte de symbole devant son peuple, il y a des choses qu’il est obligé de faire, et qu’il ne pourrait jamais faire s’il était un homme ordinaire. Je le sais par expérience, mais je l’ai vu aussi en regardant des photographies qui représentaient un roi en des circonstances actuelles : quelque chose était arrivé, qui aurait pu être un attentat, mais qui a été évité. Les photographies montraient ce roi en train de passer une revue; tout d’un coup, quelqu’un s’est précipité, peut-être avec une mauvaise intention, peut-être pas, car rien n’est arrivé; en tout cas le roi est resté complètement impassible, absolument tranquille, le même sourire aux lèvres, sans bouger de la place où il était; et il était très en vue, donc une cible facile pour celui qui voulait se précipiter et lui faire du mal. Autant que je sache, ce roi n’était pas un héros, mais parce qu’il était roi, il ne pouvait pas prendre la fuite! ç’eût été ignoble. Donc, il est resté tranquille, sans bouger, sans montrer aucune crainte extérieure. C’est un exemple de ce que l’on peut apprendre dans une vie de roi.

On raconte aussi une histoire vraie au sujet de la reine Elisabeth. Elle était arrivée aux derniers jours de sa vie et extrêmement malade. Mais il y avait des troubles dans le pays et, pour des questions d’impôt, un ensemble de gens (des commerçants, je crois) avaient formé une délégation pour lui présenter une pétition au nom d’une partie du peuple. Elle était très malade dans sa chambre, tellement malade qu’elle pouvait à peine se tenir debout. Mais elle s’est levée et s’est habillée pour les recevoir. La personne qui la soignait s’est écriée : « Mais c’est impossible, vous allez en mourir! » La reine a répondu tranquillement : « On meurt après »... C’est un exemple parmi toute une série d’expériences que l’on peut avoir dans une vie de roi, et c’est cela qui justifie le choix de l’être psychique quand il entreprend ce genre de vie.

Ce sont des souvenirs comme ceux-là qui prouvent l’authenticité de l’expérience, car ce qui arrive généralement quand les gens vous racontent leurs vies antérieures, dans ces vies il y a toujours une progression, naturellement; alors ils deviennent des personnages de plus en plus épatants dans des circonstances de plus en plus merveilleuses! C’est faux, les choses ne se passent jamais comme cela. L’être psychique suit une certaine ligne d’existence, qui développe certaines qualités, certains pouvoirs, etc., mais l’être psychique voit toujours ce qui lui manque et il peut choisir l’opposé de cette ligne dans une prochaine vie, la négation pour ainsi dire de cette expérience, pour avoir les expériences complémentaires.









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