CWM (Fre) Set of 18 volumes
Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 of CWM (Fre) 471 pages 2009 Edition
French

Translations

ABOUT

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Entretiens - 1950-1951

The Mother symbol
The Mother

Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur deux de ses livres, Éducation et Entretiens 1929, et sur La Mère, de Sri Aurobindo.

Collection des œuvres de La Mère Entretiens - 1950-1951 Vol. 4 471 pages 2009 Edition
French
 PDF   

1951




février




Le 5 février 1951

Mère lit l’Entretien du 14 avril 1929. Après avoir parlé des dangers du yoga [Si vous ne pouvez pas rejeter toute ambition, ne touchez pas à la chose : c’est du feu qui brûle.], Mère parle des deux méthodes de yoga :

« Deux chemins mènent au yoga : la discipline (tapasyâ) et la soumission. »

Qu’est-ce que la soumission?

Cela veut dire que l’on se donne complètement au Divin.

Oui, et alors qu’est-ce qui arrive? Si vous vous donnez complètement au Divin, c’est Lui qui fait le yoga, ce n’est plus vous; donc, ce n’est pas très difficile; tandis que si vous faites la « tapasyâ », c’est vous-même qui faites le yoga, et vous en avez toute la responsabilité — c’est là qu’est le « danger ». Mais il y a des gens qui préfèrent avoir toute la responsabilité, avec les dangers, parce qu’ils sont d’une nature très indépendante. Ils ne sont peut-être pas très pressés — s’il leur faut plusieurs vies pour arriver, cela ne leur fait rien. Mais il y en a d’autres qui veulent aller plus vite et être plus sûrs d’arriver, eh bien, ceux-là donnent toute la responsabilité au Divin.

(Mère poursuit sa lecture) « ... le premier effet du yoga est la suppression du contrôle mental ; et les appétits qui étaient assoupis, soudainement libérés, se précipitent pour envahir tout l’être. [...] Ce que vous 80 devez faire, c’est de garder ces choses éloignées de vous [les impulsions, et surtout les impulsions sexuelles], de vous en dissocier, d’y attacher aussi peu d’importance que possible, et même s’il vous arrive d’y penser, de rester indifférent et détaché. »

C’est beaucoup plus difficile que de s’asseoir sur une difficulté! Il est beaucoup plus difficile de vous éloigner de cette difficulté, de la regarder comme quelque chose qui ne vous concerne pas, qui ne vous intéresse pas, qui ne vous appartient pas, qui appartient au monde et pas à vous — mais c’est seulement en faisant cela que l’on peut réussir. Cela demande une sorte de libération d’esprit et une confiance en votre être intérieur : vous devez croire que si vous prenez la bonne attitude, c’est le meilleur qui vous arrivera ; mais si vous avez peur quand quelque chose de désagréable vous arrive, alors vous ne pouvez rien faire. Il faut avoir cette confiance au-dedans de vous, quelle que soit la difficulté, quel que soit l’obstacle. La plupart du temps, quand quelque chose de désagréable arrive, on dit : « Est-ce que cela va augmenter? Quel accident va encore m’arriver? » et ainsi de suite. Il faut vous dire : « Ces choses-là ne sont pas à moi : elles appartiennent au monde subconscient; il est bien entendu que je n’ai rien à voir avec ça, et si ces choses viennent encore me prendre, je vais me débattre. » Naturellement, vous allez me répondre que c’est facile à dire mais difficile à faire. Mais si, vraiment, vous prenez cette attitude de confiance, il n’est pas de difficulté que vous ne puissiez vaincre. L’inquiétude rend la difficulté plus grande.

Évidemment, il y a une difficulté, c’est que dans votre être conscient quelque chose ne « veut pas » de la difficulté, désire sincèrement la surmonter, mais il y a d’innombrables mouvements dans d’autres parties de votre conscience dont vous n’êtes pas conscient. Vous dites : « Je veux me guérir de cela », malheureusement ce n’est pas le tout de dire : « Je veux », il y a d’autres parties de la conscience qui se cachent pour que vous ne vous occupiez pas d’elles, et, quand votre attention est détournée, ces parties essaient de se manifester. C’est pourquoi je dis et je répéterai toujours : soyez parfaitement sincère; n’essayez pas de vous tromper vous-même, ne dites pas : « J’ai fait tout ce que je peux. » Si vous ne réussissez pas, c’est que vous ne faites pas tout ce que vous pouvez. Car, si vous faites vraiment « tout » ce que vous pouvez, vous réussirez sûrement. Si vous avez quelque défaut dont vous voulez vous débarrasser et qui persiste toujours, et que vous dites : « J’ai fait tout ce que je peux », vous pouvez être sûr que vous n’avez pas fait tout ce qu’il fallait. Si vous l’aviez fait, vous auriez triomphé, car les difficultés qui vous arrivent sont exactement en proportion de votre force — rien ne peut vous arriver qui n’appartienne à votre conscience, et tout ce qui appartient à votre conscience, vous pouvez le maîtriser. Même les choses et les suggestions qui viennent du dehors ne peuvent vous toucher qu’en proportion du consentement de votre conscience, et vous êtes bâti pour être le maître de votre conscience. Si vous dites : « J’ai fait tout ce que je peux et cela continue quand même, donc j’abandonne la partie », vous pouvez être certain d’avance que vous n’avez pas fait ce que vous pouviez. Quand une erreur persiste « quand même », cela veut dire que quelque chose de caché dans votre être, sort tout d’un coup comme un diable d’une boîte et prend le gouvernail de votre vie. Donc, il n’y a qu’une chose à faire, c’est d’aller à la chasse de tous les petits recoins noirs qui se cachent en vous, et, si vous mettez une toute petite étincelle de bonne volonté sur cette obscurité, elle cédera, elle disparaîtra, et ce qui vous paraissait impossible deviendra, non seulement possible, faisable, mais ce sera fait. Vous pouvez ainsi, en une minute, vous défaire d’une difficulté qui vous aurait harcelé pendant des années. Je vous en donne l’assurance absolue. Cela ne dépend que d’une chose : que vraiment, sincèrement, vous vouliez vous en débarrasser. Et c’est la même chose pour tout, depuis les maladies physiques jusqu’aux difficultés mentales les plus hautes. Une partie de la conscience dit : « Je ne veux pas », mais derrière se cache un tas d’éléments qui ne disent rien, qui ne se montrent pas, et qui veulent, justement, que les choses continuent comme elles sont — généralement pour une raison d’ignorance; ils ne croient pas que ce soit nécessaire de se guérir; ils croient que tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes. Comme disait cette dame avec qui j’avais ces entretiens : « Le manque de confort commence dès que vous voulez vous changer. » Un grand écrivain français l’a répété et en a fait sa théorie la plus chère : « Les misères commencent quand vous désirez vous perfectionner; si vous ne désirez pas vous perfectionner, vous n’aurez pas de misères! » Je peux vous dire que c’est absolument faux, mais il y a tout de même de ces choses en vous, qui veulent absolument qu’on les laisse tranquilles, que l’on ne vienne pas les déranger : « Oh! que vous êtes fatigant, laissez-nous tranquilles! »

« Le monde entier est plein de ce poison [doute, hésitation, dépression]; vous l’absorbez chaque fois que vous respirez. Si vous échangez quelques mots avec un homme indésirable, ou même que cet homme passe seulement près de vous, vous pouvez attraper de lui la contagion. [...] Tant que vous appartenez à l’humanité ordinaire et menez la vie ordinaire, vos relations avec les gens ont peu d’importance. Mais si vous voulez la vie divine, il faut devenir très soigneux de vos fréquentations et de votre entourage. »

Pour tâcher de résoudre ce problème, les ascètes s’en allaient dans la forêt s’asseoir sous un arbre; là, évidemment, ils n’avaient pas à craindre la contagion des autres êtres humains. Mais il est très difficile d’aller jusqu’au bout de cette détermination, car on a vite fait de savoir qu’un saint homme est assis sous un arbre en méditation, et immédiatement tout le monde se précipite! Non seulement il n’échappe pas à la difficulté, mais il l’aggrave, car s’il est une chose plus dangereuse que le reste, c’est d’enseigner les autres. Vous en savez un tout petit peu et vous commencez à enseigner les autres, et vous êtes tout de suite obligé de dire plus que vous n’en savez, parce qu’on vous pose des questions auxquelles vous ne pouvez pas répondre, à moins que vous ne soyez un héros du silence. Dans le monde, ceux qui veulent s’imposer comme instructeurs spirituels, quand on vient leur demander quelque chose qu’ils ne savent pas, ils l’inventent. Donc, si dans votre discipline intérieure vous commencez à prétendre, vous pouvez être sûr que vous tombez dans le pire des trous — de toutes choses, prétendre est ce qu’il y a de plus néfaste. Dans le monde, vous pouvez peut-être passer pour ce que vous n’êtes pas, car les gens se laissent facilement tromper, et cela ne vous conduira pas à une catastrophe (quoique, si vous exagérez, cela conduit toujours à une catastrophe), mais dans le monde spirituel, vous n’avez pas affaire aux êtres humains, c’est au Divin que vous avez affaire; il vous est impossible de prétendre que vous êtes ceci et cela, car le Divin le sait mieux que vous, n’est-ce pas. Il sait ce que vous êtes, et ce n’est pas ce que vous direz qui pourra L’influencer.

Dans toutes les disciplines spirituelles, la première chose que l’on vous apprend est de ne pas raconter vos expériences aux autres. Si vous avez besoin d’éclairer votre esprit, dites vos expériences à votre instructeur spirituel et à personne d’autre, et même vis-à-vis de votre instructeur spirituel, il faut être très soigneux. Quand vous lui présentez ou expliquez ce qui s’est passé en vous, si vous vous observez attentivement, vous verrez qu’il y a des choses en vous dont vous n’êtes pas totalement conscient; dans vos expériences il y a souvent des trous, des interruptions dans la continuité (il est extrêmement difficile d’arriver à la continuité de la conscience et de pouvoir suivre les mouvements jusqu’au bout), alors, si vous racontez l’expérience sans vouloir ajouter quoi que ce soit, sans manquer de sincérité, vous y mettez quand même ce qui manque. Quand on vient me raconter quelque chose, un événement intérieur, on trouve parfois que je suis inattentive, que je n’attache pas d’importance à ce que l’on me raconte — ce n’est pas cela, c’est que j’écoute au-dedans, je vois ce qui est parfaitement exact et les petits faits que l’on a ajoutés. Et généralement, je n’encourage pas ces choses à cause de cela. Je sais que l’on peut se sentir allégé, soulagé si l’on peut me raconter ce qui s’est passé, mais alors il faut venir avec un esprit si merveilleusement scientifique. Jamais un savant ne vous dira : « C’est comme cela ou c’est comme ceci », à moins qu’il n’ait fait toutes les expériences possibles pour avoir la preuve de ce qu’il dit. Et pour les choses spirituelles, il faut suivre la même méthode. Au lieu de dire : « J’ai fait cela, les choses se passaient comme cela », il faut dire : « J’avais l’impression... les choses avaient l’air d’être ainsi » et « Il me semblait qu’il y avait une relation entre ceci et cela... » et pas seulement comme une formule de conversation, mais comme quelque chose qui exprime vraiment un état d’esprit. Si vous cherchez un éclaircissement, il ne faut pas expliquer la chose vous-même d’avance, car une fois que vous m’avez donné l’explication, je n’ai plus d’explication à vous donner! Vous m’apportez des fleurs, par exemple, des fleurs de toutes sortes, mais vous ne les arrangez pas, vous me dites : « Voilà, je vous apporte des fleurs, c’est à vous d’en faire un bouquet. » Comme cela, c’est beaucoup plus facile pour moi, n’est-ce pas; je peux prendre les éléments qu’il me faut et vous fournir l’explication de ce qui est arrivé. Mais si vous m’apportez un bouquet tout fait, dans lequel je vois des fleurs qui ne sont pas des fleurs, qui sont des imitations, je ne peux rien vous dire, car il me faut uniquement des choses qui sont pour ainsi dire « pures ». Donc, souvenez-vous de la recommandation : je suis toujours prête à vous entendre, mais ne m’apportez pas des choses toutes faites. Donnez-moi la notation exacte de ce qui est arrivé, et, même comme cela, vous pouvez être sûr que dès qu’il y a transcription mentale, le mental sait toujours boucher les trous — il aime que les choses soient logiques, continues; et sans que vous le sachiez, tout à fait spontanément, il fournit les éléments qui manquaient à votre expérience. Je n’accuse personne, je sais que c’est un phénomène spontané. Il faut être extrêmement attentif pour être tout à fait exact et précis.

N’y a-t-il pas un danger à se dire : « Mes mouvements ne m’appartiennent pas, je n’ai pas à m’en occuper » ?

Oui, évidemment, si vous vous dites : « Je ne peux rien faire, cela appartient à la Nature, il faut que le mouvement suive son chemin naturel », vous faites ce que je vous ai dit de ne pas faire, vous vous servez du Divin comme d’un beau manteau pour couvrir la satisfaction de vos désirs. Mais le mouvement opposé : « Je ne suis bon à rien parce que cette idée m’a traversé le cerveau », est également faux, n’est-ce pas.

Naturellement, s’il vous vient une impulsion dont vous ne voulez pas, la première chose à faire est de vouloir qu’elle ne vienne plus, mais si, au contraire, vous ne voulez pas sincèrement qu’elle disparaisse, alors gardez-la, mais n’essayez pas de faire le yoga. Il ne faut prendre le chemin que si vous êtes décidé d’avance à surmonter toutes les difficultés. Il faut que la décision soit sincère et complète. Vous vous apercevrez, d’ailleurs, au fur et à mesure que vous avancerez, que ce que vous croyez complet ne l’est pas, que ce que vous croyez sincère ne l’est pas, et alors vous ferez petit à petit des progrès; mais pour réussir, il faut avoir aussi totalement que possible la volonté de progrès. Si vous avez cette volonté et qu’une impulsion s’empare de vous avec violence, gardez ferme la volonté, il ne faut pas que l’être vacille; il faut s’attendre à ce que les choses viennent, n’est-ce pas, mais quand elles viennent, dites-vous : « Bien, elles viennent d’en bas, mais je ne veux pas qu’elles se reproduisent, elles ne sont pas à moi. » Ce n’est pas la même chose que de se dire : « Laissons faire puisque c’est la Nature. »

Il faut qu’il y ait déjà un commencement de réalisation dans le vital pour qu’il se révolte contre les impulsions qui lui viennent. La plupart des êtres humains, et même ceux qui pensent faire le yoga, immédiatement quand une impulsion arrive, disent : « C’est tout à fait bon, il n’y a rien à faire, c’est tout à fait bon. » Alors, si quelque chose en vous se révolte, si quelque chose dit : « Je ne veux pas », c’est la partie supérieure de votre être. Ce qui prend la résolution de faire le yoga, ce n’est pas votre corps ni votre vital, ni même votre mental, c’est la partie supérieure de votre mental ou c’est votre être psychique. Ce n’est que cela qui peut prendre la résolution — votre corps ne sait pas très bien de quoi il s’agit, votre vital regarde le commencement de transformation avec une certaine anxiété, le mental avec ses idées déclare : « Ceci peut se faire comme cela, peut s’expliquer comme ceci », et ainsi de suite. Donc, si vous avez une résolution, elle vient de la partie supérieure de votre être, et c’est sur elle qu’il faut vous appuyer, pas sur autre chose — c’est cela le « je ». Et il faut qu’il comprenne finalement que ce n’est pas un « je » personnel, mais universel et divin.

Mais n’est-ce pas le vital lui-même qui, finalement, doit prendre la décision de se changer?

Je peux vous garantir que le vital, laissé à lui-même, ne prendra jamais la décision de se transformer — il est tout à fait satisfait de lui-même et, par-dessus le marché, étant le complice du mental, le mental lui donnera toutes les explications possibles de tout ce qu’il fait. Les gens qui vivent dans leur conscience vitale sont, même s’ils ne le disent pas, toujours très contents d’eux-mêmes. Ils sont aussi très contents de tout ce qui leur arrive et ils disent toujours de leurs impulsions : « Comme c’est intéressant, comme c’est intéressant! » Alors, si vous attendez que le vital prenne la décision, vous pouvez attendre longtemps!

Il faut apprendre à votre vital qu’il doit obéir. Avant d’éprouver une satisfaction, il faut qu’il comprenne qu’il n’a rien d’autre à faire qu’à obéir. C’est pourquoi je dis qu’il n’est pas très facile de commencer le yoga ; si vous n’êtes pas sincère, ne commencez pas.

Le corps est très obéissant; vraiment il essaye de faire de son mieux, mais il ne sait pas à qui obéir, car, généralement, il n’est pas en rapport direct avec l’être supérieur ou le psychique. Les impulsions lui viennent directement du mental ou du mental revêtu de vital, et il fait ce qu’ils désirent. Avant que le vital ne prenne une décision (et je vous l’ai dit, ce n’est pas très facile pour lui de prendre une décision), il faut qu’une lumière commence à naître dans la partie la plus haute du mental, une lumière qui vous mette en rapport avec une conscience supérieure ou avec le psychique, et c’est sur cette lumière qu’il faut prendre son point d’appui pour faire comprendre les choses au mental, au vital et finalement au corps.









Let us co-create the website.

Share your feedback. Help us improve. Or ask a question.

Image Description
Connect for updates