Ce volume comporte les réponses de la Mère aux questions des enfants de l’Ashram et des disciples, et ses commentaires sur son livre Éducation, et sur trois œuvres courtes de Sri Aurobindo : Les Éléments du Yoga, La Mère et Les Bases du Yoga.
Mère lit Les Éléments du Yoga, Chapitre XIII, « La Sexualité, la Nourriture, le Sommeil ».
« Q : Est-ce que l’on contrôle mieux les sens en mangeant très peu ?
R : Non, cela les exaspère simplement — il vaut mieux prendre une quantité modérée de nourriture. Les gens qui jeûnent s’exaltent facilement et peuvent perdre leur équilibre.
Q : Si l’on prend seulement la nourriture végétarienne, est-ce une aide au contrôle des sens?
R : Cela évite quelques-unes des difficultés que rencontrent ceux qui mangent de la viande, mais cela ne suffit pas. »
Des questions?
Qu’est-ce qui arrive si on mange de la viande?
Voulez-vous que je vous raconte une histoire? Je connaissais une dame, une jeune femme suédoise, qui faisait la sâdhanâ ; et elle était habituellement végétarienne, par goût et par habitude. Un jour, elle a été invitée par des amis qui lui ont donné du poulet à manger. Elle ne voulait pas faire une histoire, elle a mangé son poulet. Mais après, dans la nuit, voilà que tout d’un coup elle se trouve dans un panier avec la tête entre deux morceaux d’osier, secouée, secouée, secouée, et se sentant malheureuse, misérable; et puis après, elle se sent la tête en bas, les pieds en l’air, et secouée, secouée, secouée... (rires) Elle se sent tout à fait misérable; et puis tout d’un coup, voilà qu’on commence à arracher des choses de son corps, et ça lui fait terriblement mal, et puis quelqu’un arrive avec un couteau et lui coupe le cou; et alors elle se réveille. Elle m’a raconté ça ; elle m’a dit que jamais elle n’avait eu un cauchemar aussi affreux, qu’elle n’avait pensé à rien avant de s’endormir, que c’était simplement la conscience de cette pauvre poule qui était entrée en elle, et qu’elle avait eu en rêve toutes les angoisses que cette pauvre poule avait eues quand elle avait été portée au marché, vendue, les plumes arrachées et le cou coupé! (rires)
Voilà ce qui arrive! C’est-à-dire que dans une proportion plus ou moins grande, vous avalez en même temps que la viande un peu de la conscience de l’animal que vous avez mangé. Ce n’est pas très grave, mais ce n’est pas toujours très agréable. Et, évidemment, ça ne vous aide pas à être plutôt du côté de l’homme que du côté de la bête! Il est évident que les hommes primitifs, ceux qui étaient encore beaucoup plus près de la bête que de l’esprit, il paraît qu’ils mangeaient de la viande crue; et ça donne beaucoup plus de force que la viande cuite. Ils tuaient la bête, ils la dépeçaient et puis ils mordaient dedans, et ils étaient très forts. Et c’est pour cela, d’ailleurs, que dans leurs intestins il y avait ce petit morceau d’appendice, qui à ce moment-là était beaucoup plus grand, et qui servait à digérer cette viande crue. Et alors, l’homme a commencé à faire de la cuisine. Il a trouvé que ça avait meilleur goût, et il a mangé la viande cuite, et, petit à petit, l’appendice est devenu plus petit, et puis il ne servait plus à rien. Alors maintenant, c’est un encombrement qui, quelquefois, est cause d’une maladie.
C’est pour vous dire que peut-être, maintenant, il est temps de changer sa nourriture et de passer à quelque chose d’un peu moins bestial ! Cela dépend absolument de l’état de conscience de chacun. Pour un homme ordinaire, vivant la vie ordinaire, ayant les activités ordinaires, ne pensant pas du tout à autre chose qu’à gagner sa vie, à se bien porter et peut-être à prendre soin de sa famille, il est bon qu’il mange de la viande, il est bon qu’il mange n’importe quoi, ce qui lui réussit, ce qui lui fait du bien.
Mais si on veut passer de cette vie ordinaire à une vie supérieure, le problème commence à avoir de l’intérêt; et si, après avoir passé à une vie supérieure on essaye de se préparer à la transformation, alors cela devient très important. Parce qu’il y a certainement des nourritures qui aident le corps à se subtiliser, et d’autres qui le maintiennent dans un état de bestialité. Mais c’est seulement à ce moment-là que c’est très important, pas avant; et avant d’être arrivé à ce moment-là, il y a beaucoup d’autres choses à faire. Il vaut certainement mieux purifier son mental, et purifier son vital, avant de songer à purifier son corps. Parce que, même si vous prenez toutes les précautions possibles et que vous vivez physiquement en ayant soin de n’absorber que ce qui aidera à subtiliser votre corps, si votre mental et votre vital restent dans des états de désir, d’inconscience, d’obscurité, de passion et de tout le reste, cela ne servira à rien du tout. Simplement votre corps deviendra faible, disloqué d’avec la vie intérieure et il tombera malade un beau matin.
Il faut commencer par le dedans, je vous ai dit ça déjà une fois. Il faut commencer par en haut, il faut d’abord purifier le haut et puis purifier le bas. Je ne dis pas qu’il faut se livrer à toutes sortes de choses dégradantes dans le corps. Ce n’est pas ça que je vous dis. Ne le prenez pas pour un conseil de manque de contrôle sur vos désirs! Ce n’est pas du tout ça. Mais je veux dire : n’essayez pas d’être un ange dans le corps si vous n’avez pas déjà été un petit peu un ange dans votre mental et votre vital; parce que ça vous disloquerait d’une façon opposée à la façon ordinaire, mais qui n’est pas meilleure. Nous avons dit l’autre jour que ce qui est tout à fait important, c’est de garder l’équilibre. Eh bien, pour garder l’équilibre, il faut que tout progresse en même temps. Il ne faut pas que vous laissiez une partie de votre être dans l’obscurité, et que vous essayiez d’amener l’autre à la lumière. Il faut prendre grand soin de ne laisser aucun coin obscur. Voilà.
Pourquoi avant était-il défendu de manger des œufs à l’Ashram? Maintenant, tu donnes des œufs!
C’était défendu de manger des œufs?
Je ne sais pas. C’est ce qu’on nous disait.
Ah, on dit beaucoup de choses, mais je ne suis pas responsable de toutes les choses qu’on dit! (rires) Je ne me souviens pas d’avoir jamais refusé un œuf à quelqu’un qui en avait besoin au point de vue de la santé. Mais si les gens viennent demander quelque chose simplement par gourmandise, pour leur plaisir, je leur refuse toujours, aussi bien maintenant qu’avant. C’est seulement, n’est-ce pas, au point de vue de la santé, de l’équilibre physique, que certaines choses sont admises. Tout est admis. Je n’ai pas refusé de viande à quelqu’un qui en avait besoin. Il y a eu des gens qui en ont mangé, parce qu’ils en avaient besoin. Mais si on vient me demander n’importe quoi, simplement pour satisfaire un désir, je dis non, quoi que ce soit, même des ice-creams! (rires)
Quand on mange l’œuf, on ne mange pas la poule dedans?
Pas encore formée, la conscience de la poule! Surtout qu’il faut prendre soin de manger l’œuf frais, avant que le poulet ne commence à être formé.
Douce Mère, si l’agonie d’une poule peut nous attaquer, de même celle d’une betterave ou d’une carotte peut aussi nous attaquer?
Je crois tout de même que la poule est plus consciente que la betterave. (rires) Mais je dois vous dire ma propre expérience. Seulement je croyais que ça, ce n’était pas courant.
À Tokyo j’avais un jardin, et dans ce jardin je cultivais des légumes moi-même. J’avais un assez grand jardin et j’avais beaucoup de légumes. Et alors, tous les matins, j’allais me promener après leur avoir donné de l’eau et tout ça ; je me promenais pour choisir quels étaient les légumes que j’allais prendre pour manger. Eh bien, figurez-vous qu’il y en avait qui me disaient : « Non, non, non, non, non... » et puis, il y en avait d’autres qui appelaient, et je les voyais de loin, et qui me disaient : « Prendsmoi, prends-moi, prends-moi! » Alors c’était très simple, j’allais chercher celles qui voulaient être prises et jamais je ne touchais à celles qui ne voulaient pas. Je pensais que c’était quelque chose d’exceptionnel. J’aimais beaucoup mes plantes, je m’en occupais, j’avais mis beaucoup de conscience dedans en les arrosant, en les nettoyant, alors je supposais qu’elles avaient peut-être une capacité spéciale.
Mais en France, c’était la même chose. J’avais aussi un jardin dans le midi de la France où je cultivais des petits pois, des radis, des carottes. Eh bien, il y en avait qui étaient contents, qui demandaient à ce qu’on les prenne et qu’on les mange, et il y en avait qui disaient : « Non, non, non, ne touchez pas, ne touchez pas! » (rires)
Pourquoi, Douce Mère, disaient-ils ça ?
Eh bien, j’ai fait l’expérience, pour savoir justement; et le résultat n’était pas toujours le même. Certaines fois, c’était vraiment que la plante n’était pas mangeable; elle n’était pas bonne, c’était dur ou c’était amer, elle n’était pas bonne à manger. D’autres fois, c’était qu’elle n’était pas prête, que c’était trop tôt; elle n’était pas mûre. En attendant un ou deux jours, un ou deux jours après, elle me disait : « Prends, prends, prends! » (rires)
Autrefois, les sages faisaient souffrir leur corps pour réaliser le Divin! Eh bien, ils n’étaient pas sages! (rires) Ça ne mène à rien du tout, qu’à un orgueil, un orgueil spirituel, c’est tout. Mais sûrement pas à la réalisation du Divin.
Mais on dit qu’ils ont fait la sâdhanâ la plus haute, et qu’ils ont réalisé ce qu’ils voulaient!
On dit... on dit beaucoup de choses.
Est-ce que les chiens ne sont pas plus fidèles que les hommes?
Certainement! Parce que c’est leur nature d’être fidèles, et qu’ils n’ont pas de complications mentales. Ce qui empêche les hommes d’être fidèles, c’est leurs complications mentales. La plupart de gens ne sont pas fidèles parce qu’ils ont peur d’être dupes. Tu ne sais pas ce que c’est d’être dupe? Ils ont peur d’être trompés, d’être exploités. Ils ont peur de... Il y a derrière leur fidélité, il y a encore un très gros égoïsme qui est plus ou moins caché, et il y a toujours ce marchandage plus ou moins conscient, du donnant-donnant : on se donne à quelqu’un, mais qu’on se le dise ou non, on attend quelque chose en échange. Vous êtes fidèle, mais vous voulez aussi qu’on vous soit fidèle, c’est-à-dire qu’on prenne soin de vous, qu’on soit bien gentil avec vous, et surtout qu’on n’essaye pas de profiter de votre fidélité. Ça, ces complications-là, ne sont pas dans le chien, parce que son mental est très rudimentaire. Il n’y a pas cette merveilleuse capacité de raisonnement qu’ont les hommes et qui leur a fait faire tant de bêtises!
Seulement, on ne peut pas retourner en arrière. On ne peut pas redevenir un chien. Alors il faut devenir un homme supérieur, et avoir la qualité du chien sur un plan supérieur. C’est-à-dire, au lieu d’être une fidélité semi-consciente, et en tout cas très instinctive, une sorte de besoin qui le lie, il faut que ce soit une fidélité voulue, consciente, et surtout au-dessus de tout égoïsme. Il y a un point où toutes les vertus se joignent : c’est un point qui dépasse l’ego.
Si nous prenons cette fidélité, si nous prenons le dévouement, si nous prenons l’amour, si nous prenons le sens du service, toutes ces choses, quand elles sont au-dessus du niveau égoïste, elles se ressemblent, en ce sens qu’elles se donnent et n’attendent rien en échange. Et si vous montez d’un degré de plus, au lieu que cela se fasse avec un sens de devoir et d’abnégation, cela se fait dans une joie intense qui porte en elle-même sa propre récompense, qui n’a besoin de rien en échange, parce qu’elle porte en elle-même sa joie. Mais alors ça, il faut être monté assez haut et ne plus avoir de ces retours sur soi qui sont de toutes les choses celles qui vous tirent le plus en bas. Cette espèce de... cette sympathie pleine de pitié pour soi-même, où l’on se cajole, on se caresse, on dit : « Pauvre moi! », ça, c’est une chose terrible, et on fait cela d’une façon si constante, sans s’en apercevoir. Le retour sur soi, une espèce de compassion pour soi-même dégradante, où on se dit d’une façon si pleine de pitié : « Personne ne me comprend! Personne ne m’aime! Personne ne s’occupe de moi comme il faudrait! » etc., et on continue... Et alors ça, c’est terrible, cela vous tire comme dans un trou immédiatement.
Il faut avoir dépassé cela de beaucoup, l’avoir laissé loin derrière soi, pour avoir vraiment la joie de la fidélité, la joie du don de soi, qui ne s’occupe pas du tout, mais pas du tout, d’aucune façon, de savoir si c’est proprement reçu et si l’on a une réponse appropriée. N’attendre rien en échange de ce que l’on fait, n’attendre rien, non pas par ascétisme ou par sens du sacrifice, mais parce qu’on a la joie de la conscience dans laquelle on se trouve et que ça, c’est suffisant, c’est beaucoup mieux que tout ce que l’on peut recevoir, de n’importe qui; mais ça, c’est une autre chose. Il y a pas mal d’échelons entre les deux.
Mère, tu avais dit que le sommeil avant minuit est le sommeil qui nous donne le plus de repos...
Physiquement, oui.
Pourquoi?
Ah! ça, je l’ai dit par expérience personnelle et alors ça... il n’y a pas de pourquoi, n’est-ce pas. Chacun doit trouver cela pour luimême, ou ne pas le trouver. Mais j’ai entendu dire par des gens qui s’occupent de la chimie terrestre, qu’il y a certains rayons — (se tournant vers Pavitra) non? dites-nous ça, vous savez ça ? —, des rayons du soleil qui sont encore actifs dans l’atmosphère jusqu’à minuit, et d’autres rayons qui deviennent actifs après, et que les uns vous donnent de la force et que les autres vous la retirent. Mais il y a beaucoup de choses qui sont comme ça ; du moins ça, vous savez, c’est quelque chose qu’on entend dire ou qu’on lit dans les livres. Je vous le donne pour ce que ça vaut, je n’en sais rien. Quelqu’un qui est très calé dans la matière pourrait vous donner une explication plus complète. (Riant) Mais il y a des choses qui sont vraies, pratiquement. Je ne veux pas dire pourquoi; peut-être que ce sont seulement des choses personnelles. Mais enfin, j’ai entendu dire aussi par d’autres une expérience analogue. Par exemple, vous allez dans la mer, vous y restez quelques minutes, vous en sortez plein de force. Vous allez dans la mer, vous y restez une heure, vous sortez éreinté! Même pour un bain chaud, c’est la même chose. Vous avez un bain chaud; vous êtes bien fatigué; vous vous trempez dedans, vous restez tout au plus une minute, vous sortez, vous êtes tout rafraîchi. Vous y restez un quart d’heure, vous sortez, vous n’avez plus de force, plus d’énergie, plus rien, vous êtes vidé.
Je vous dis, je ne peux pas vous parler d’une façon compétente de la raison, mais le fait est là. C’est comme ça. Pour moimême j’ai une explication, mais elle ne vaut que pour moi, elle ne vaut pas pour les autres. Alors elle ne sert à rien.
De ces étapes de sommeil dont il est question maintenant, si l’on est conscient de ses nuits, on peut faire cela en quelques minutes. On n’a pas besoin d’attendre des heures de sommeil pour faire cela, n’est-ce pas; si l’on est conscient, on peut en quelques minutes passer par tout ça. D’abord, la première chose, quand on est conscient de ses nuits, c’est, avant de s’endormir profondément, juste dans l’état où on commence à se détendre, où on détend tous ses nerfs — je vous ai expliqué cela déjà, on détend tous ses nerfs, et on se laisse aller... comme ça... n’est-ce pas —, eh bien, à ce moment-là, il faut détendre avec grand soin toute l’activité mentale, et laisser ça tranquille, aussi tranquille que possible, et ne vous endormir que quand votre mental est bien tranquille. Alors il y a toute une période d’excitation inutile à laquelle vous échappez, et qui est extrêmement fatigante. Si vous pouvez faire que le mental se détende et entre dans une paix complète avant de dormir, votre sommeil sera tout de suite très paisible et très rafraîchissant; bien entendu, il ne faut pas que votre vital soit en ébullition, parce qu’alors là, il vous amènera dans toutes sortes de domaines et vous fera faire toutes sortes de bêtises, et le résultat sera que vous vous réveillerez encore plus fatigué que vous vous êtes endormi.
Mais si vous êtes conscient, après avoir calmé votre vital, quand vous commencez à sortir de votre conscience physique et à entrer dans une conscience plus subtile, vous endormez votre vital, vous lui dites : « Repose-toi, tiens-toi bien tranquille », et puis vous entrez dans votre activité mentale, et vous dites au mental : « Repose-toi, reste bien tranquille », et vous l’endormez aussi; et puis vous sortez du mental dans une région supérieure, et alors là, si ça commence à vous intéresser... par exemple, si ce sont les premières fois que vous y allez, vous pouvez regarder ce qui se passe, avoir votre expérience, apprendre des choses, (quelquefois on apprend des choses très intéressantes); et puis, quelquefois aussi, on peut devenir conscient d’un certain état général, avoir des notions sur les autres gens, et sur les autres choses; c’est intéressant! Et après, si vous en avez assez vous dites : « Tiens-toi tranquille, dors, ne bouge pas », et vous endormez cela, et vous vous élevez dans une conscience encore plus haute, et ainsi de suite, jusqu’à ce que vous arriviez dans un état où vous êtes en bordure de la forme (je ne parle pas de la forme physique), en bordure de toute forme, beaucoup plus haut que la forme de pensée, naturellement; en bordure de toute forme et de toute vibration, dans le silence parfait, ce qu’ici on appelle le Satchidânanda. Et quand vous êtes là, alors tout s’arrête, toutes les vibrations se calment, et si vous restez là seulement trois minutes, vous revenez à votre corps ensuite ab-so-lu-ment reposé, rafraîchi, fortifié, comme si vous aviez dormi pendant des heures! Ça, c’est une chose qu’on peut apprendre à faire — je ne dis pas du jour au lendemain, il faut un petit peu de travail et puis d’obstination aussi, mais enfin... ça, il faut apprendre à le faire; et quand vous êtes bien tourmenté, bien fatigué, bien... par exemple, quand vous venez de subir des attaques violentes de forces adverses sous une forme ou sous une autre, et que vous êtes bien fatigué, si vous suivez ce processus consciemment, eh bien, tout cela, en quelques minutes, disparaît complètement. C’est une chose qui vaut la peine d’être apprise. Seulement il faut être très, très, très persévérant, parce que... Tenez, je vais encore là vous raconter quelque chose.
Quand j’ai commencé à travailler l’occultisme, je me suis aperçue que... quand j’ai commencé justement à m’occuper de mes nuits pour les rendre conscientes, je me suis aperçue qu’il y avait, entre le physique subtil et le vital le plus matériel, une petite région, très petite, qui n’était pas suffisamment développée pour servir de lien conscient entre les deux activités. Alors ce qui se passait dans la conscience du vital le plus matériel ne se traduisait pas exactement dans la conscience du physique le plus subtil. Il y en avait qui se perdait en route, parce que c’était comme un — pas positivement un vide, mais quelque chose qui était seulement à demi conscient, pas suffisamment développé. Je savais qu’il n’y a qu’un moyen, c’est de travailler pour le développer. J’ai commencé à travailler. Ceci se passait à peu près au mois de février, je crois. Un mois, deux mois, trois mois, quatre mois, pas de résultat. Nous continuons. Cinq mois, six mois... c’était à la fin de juillet ou au commencement d’août. Je suis partie de Paris, de la maison où j’habitais, et je suis arrivée à la campagne, un tout petit endroit, au bord de la mer, chez des amis qui avaient un jardin. Alors dans ce jardin il y avait une pelouse — vous savez ce que c’est une pelouse, n’est-ce pas? de l’herbe —, où il y avait des fleurs, et puis des arbres autour. C’était un joli endroit très tranquille, très silencieux. Je me suis couchée sur l’herbe, comme ça, à plat ventre, avec les coudes dans l’herbe, et puis tout d’un coup, toute la vie de cette nature, toute la vie de cette région entre le physique subtil et le vital le plus matériel, qui est très vivante dans les plantes et dans la nature, toute cette région est devenue subitement, soudainement, sans transition, absolument vivante, intense, consciente, merveilleuse. Et c’était le résultat, n’est-ce pas, des six mois de travail qui n’avaient rien donné. Je ne m’étais aperçue de rien; mais juste une petite condition comme ça, et le résultat est là. C’est comme le poussin dans l’œuf, hein! Il est là pendant très longtemps et on ne voit rien du tout. Et on se demande s’il y a même un poussin dans l’œuf; et puis tout d’un coup, tic ! il y a un petit trou, hein, et puis tout éclate et le poussin sort. Il est tout prêt, mais il a pris tout ce temps pour se former; c’est comme ça. Quand vous voulez préparer quelque chose audedans de vous, c’est comme ça, c’est comme le poussin dans l’œuf. Il faut très longtemps, et sans avoir le moindre résultat, ne jamais se décourager, et continuer son effort, absolument régulièrement, comme si l’on avait l’éternité devant soi, et que l’on était d’ailleurs tout à fait désintéressé du résultat. On fait le travail, parce qu’on le fait. Et puis, tout d’un coup, un jour, ça éclate et on a tout l’effet de son travail qui vous apparaît.
Mais vous comprenez, n’est-ce pas, on parle comme ça, très facilement, de devenir conscient de ses nuits, d’avoir le contrôle sur ses activités de sommeil et sur toutes sortes de choses de ce genre, mais il faut beaucoup de petits travaux comme ça, comme je viens de vous en décrire un. Il en faut beaucoup pour arriver à ce résultat. Quand l’un est fait, on s’aperçoit qu’il y en a un autre qui manque, et quand l’autre est fait, on s’aperçoit qu’il y en a encore un autre, et ainsi de suite; jusqu’à ce qu’un beau jour, on puisse faire ce que je vous ai dit, et qu’on s’en aille d’un plan à l’autre, comme ça, mettant tout en repos, jusqu’à ce que l’on sorte de toute activité et que l’on entre dans le repos suprême, consciemment. Ça vaut la peine.
Voilà !
Autre question? Non!
Fini.
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