Ce volume comporte les commentaires de la Mère sur les Pensées et Aphorismes de Sri Aurobindo, et le texte de ces Aphorismes.
42 — Si Dieu m’assigne une place dans l’Enfer, je ne vois pas pourquoi j’aspirerais au Ciel. Il sait mieux que moi ce qui est pour mon bien.
L’Enfer et le Ciel existent-ils ?
Les cieux et les enfers sont à la fois vrais et faux. Ils existent et n’existent pas.
La pensée humaine est créatrice; elle donne des formes plus ou moins durables à la substance mentale et vitale et même à celle du physique subtil. Ces formes sont plutôt des apparences que des réalités; mais pour ceux qui les pensent et, plus encore, pour ceux qui y croient, elles ont une existence suffisamment concrète pour donner l’illusion de leur réalité. Ainsi, pour les croyants de certaines religions qui affirment l’existence d’un enfer, d’un paradis ou de cieux divers, ces lieux existent pour eux d’une façon objective et, à leur mort, ils peuvent y aller pendant un temps plus ou moins long. Mais ce ne sont que des formations mentales sans permanence; elles ne portent pas en elles la vérité éternelle.
J’ai vu des cieux et des enfers où allaient certaines gens après leur mort, et il est très difficile de leur faire comprendre que ce n’est pas vrai. Il m’a fallu, une fois, plus d’un an pour convaincre quelqu’un que son soi-disant enfer n’était pas l’enfer, et pour l’en sortir.
L’enfer dont Sri Aurobindo parle ici est plutôt un état de conscience qu’un lieu, c’est la condition psychologique que l’on se fait à soi-même.
De même que l’on peut porter en soi le ciel d’une communion béatifique avec le Divin, on peut aussi, quand on ne prend pas soin de maîtriser dans sa nature les tendances âsouriques 12 , porter dans sa conscience un enfer de misère et de désolation.
Il est des moments dans la vie quand tout ce qui vous entoure, personnes et circonstances, est si obscur, si adverse, si laid, que tout espoir d’une réalisation supérieure semble s’évanouir, et le monde paraît voué irrémédiablement à la nuit d’une haine cruelle, d’une ignorance inconsciente et obstinée, d’une mauvaise volonté irréductible. C’est alors qu’on peut dire, avec Sri Aurobindo : « Dieu m’a assigné une place dans l’Enfer. » Et, avec lui aussi, il faut, en toutes circonstances, si terribles qu’elles paraissent, rester dans la joie paisible de l’abandon total au Divin et dire au Seigneur, en toute sincérité : « Que Ta Volonté soit faite. »
13 juillet 1960
Home
The Mother
Books
CWM
French
Share your feedback. Help us improve. Or ask a question.